100.

Dans la brume qui annonçait l’aube, Ambra Vidal se cramponna à son portable. Julián était désolé ? La peur l’envahit. Quels aveux allait-il lui faire ?

Deux agents de la Guardia se tenaient à distance respectueuse. Ils ne pouvaient l’entendre.

— Ambra… Ma proposition de mariage… je m’en veux tellement.

Où voulait-il en venir ? Était-ce vraiment le moment de parler de ça ?

— Je voulais me montrer romantique. Au lieu de quoi je t’ai mise dans une situation impossible ! Et puis il y a eu ma réaction, quand tu m’as avoué que tu ne pouvais pas avoir d’enfants… Mon état n’avait rien à voir avec ça… c’est juste que je ne comprenais pas pourquoi tu ne me l’avais pas dit plus tôt. J’ai brûlé les étapes, je sais, mais j’étais fou de toi. Je voulais qu’on vive ensemble très vite. Peut-être parce que mon père était mourant et que…

— Julián ! l’interrompit-elle. Tu ne me dois aucune excuse. Il s’est passé des événements mille fois plus importants que…

— Non, rien n’est plus important ! Pour moi, en tout cas. Je veux que tu saches que je suis désolé d’avoir si mal agi.

Ambra retrouvait enfin l’homme sincère et vulnérable dont elle était tombée amoureuse il y a quelques mois.

— Merci, Julián, murmura-t-elle. Ça me touche.

Dans le silence gênant qui suivit, elle trouva le courage de poser la question qui l’avait taraudée toute la nuit :

— Julián, es-tu impliqué, d’une manière ou d’une autre, dans le meurtre d’Edmond Kirsch ?

Le prince resta silencieux un long moment. Quand il répondit enfin, sa voix tremblait :

— C’est vrai que je vivais mal de te voir passer autant de temps avec Kirsch. Et je n’aimais pas l’idée que tu reçoives ce trublion au Guggenheim. Honnêtement, j’aurais préféré que tu ne le rencontres jamais. (Il marqua une pause.) Mais je n’ai rien à voir avec sa mort. Je te le jure. J’ai été horrifié de voir cet homme assassiné en public… à quelques mètres de la femme que j’aime ! J’ai eu la peur de ma vie !

Ambra ressentit un immense soulagement.

— Julián, je suis navrée d’avoir eu à te le demander, mais je ne savais plus quoi penser.

Le prince lui raconta ce qu’il savait sur les rumeurs entourant le meurtre de Kirsch et lui rapporta son dernier entretien avec son père, dont l’état de santé s’était rapidement détérioré.

— Viens me rejoindre, dit-il. J’ai besoin de toi.

Il y avait tant de tendresse dans sa voix…

— Une dernière chose, reprit-il d’un ton plus léger. Je viens d’avoir une idée, une idée un peu folle, et je voudrais avoir ton avis… Et si on annulait nos fiançailles ? Si on recommençait tout à zéro ?

Cette proposition lui fit un choc. Elle mesurait les retombées politiques d’une telle décision pour le prince, pour le Palais.

— Tu… tu ferais ça ?

Julián éclata de rire.

— Mon amour, pour avoir une chance de te redemander en mariage un jour, en privé… je suis prêt à tout !

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