13.

Le ministre des Communications Zhang Bo entra dans le bureau du Président. C’était une longue pièce, et le grand homme était assis tout au fond, derrière un immense bureau en bois de cerisier.

Zhang s’avança en passant devant les vitrines, les lambris délicatement sculptés et les tapisseries d’une valeur inestimable. Certains ministres avaient donné un nom à ce parcours interminable pour s’approcher du Président : la Longue Marche. C’était une leçon d’humilité, mais aussi une humiliation. Zhang savait qu’il était un peu corpulent et que les gens disaient qu’il marchait en canard. Il en avait bien conscience tandis que le Président le regardait s’approcher.

— Oui ? dit enfin celui-ci.

— Pardonnez mon intrusion, Excellence, mais êtes-vous au courant de l’affaire de Wong Waijeng ?

Le Président secoua la tête. Son visage était ridé malgré ses cheveux noir de jais.

— C’est un dissident sans importance, un… (Zhang hésita un instant : le terme généralement utilisé était « blogueur de la liberté », mais il n’aurait guère été diplomatique de le prononcer en la présence du Président.) Il postait des… choses… en ligne.

— Mais maintenant ?

— Maintenant, il a été arrêté.

— Ainsi qu’il convenait.

— Oui, mais il y a une… circonstance malheureuse. Le Président haussa les sourcils.

— Ah ?

— Il a sauté d’un balcon, et il est maintenant paralysé à partir de la taille.

— A-t-il résisté à son arrestation ?

— Ma foi, oui, en tentant de fuir.

Le Président fit un geste pour couper court.

— Eh bien, alors…

— Si les policiers l’avaient laissé étendu à terre en attendant l’arrivée des secours, on me dit qu’il s’en serait très bien remis. Mais l’un des agents l’a obligé à se relever, et c’est pour cela qu’il est désormais paralysé.

Le Président sembla agacé.

— Qu’attendez-vous de moi ? Que je m’occupe de réprimander un officier de police ?

— Non, non, rien de tel. Mais cette affaire a pris des proportions internationales. Amnesty International en a parlé.

— Des étrangers, dit le Président en faisant de nouveau un petit geste dédaigneux.

— Oui, mais nous avons reçu une proposition d’un savant japonais qui pense être capable de guérir ce jeune homme. Vous l’avez peut-être vu aux informations ? Il a rendu la vue à une jeune fille au Canada. On dit de lui que c’est un faiseur de miracles. Et il nous propose ses services gratuitement.

— Pourquoi ce Wong en particulier, alors qu’il y a tant d’infirmes dans le monde ?

— Ce savant me dit que sa technique, du moins au stade actuel, ne peut réussir que sur des cas de lésion récente, quand les nerfs ne se sont pas encore atrophiés. Et par ailleurs, le fait que Wong n’ait que vingt-huit ans aide beaucoup, me dit-il. La « résilience de la jeunesse », ainsi qu’il l’appelle.

— Je ne vois pas la nécessité de récompenser un criminel.

— Non, bien sûr, mais…

— Mais quoi ?

Zhang haussa les épaules.

— Mais je voudrais bien donner suite à cette proposition. Je voudrais pouvoir court-circuiter la paperasse, et que cette opération se réalise.

— Pourquoi ?

Zhang avait été si sûr de lui avant la Longue Marche, avant d’être pris dans le rayon laser de ce regard… Il inspira profondément.

— Parce que nous… parce que vous, Excellence, pourriez bénéficier d’une bonne presse, pour une fois. Bien que cet homme soit effectivement un criminel, le monde entier verra que nous l’avons traité avec générosité.

Le Président sembla sidéré. Zhang s’efforça de ne pas trembler. Enfin, le grand homme hocha la tête.

— Comme vous voudrez, dit-il.

— Merci, Excellence, dit Zhang.

Le retour vers la porte lui sembla beaucoup plus facile…


Le studio de CKCO à Kitchener se trouvait à un quart d’heure en voiture de la maison de Caitlin, et il y avait eu peu de circulation en ce dimanche matin. Le père de Caitlin était retourné travailler, mais sa mère l’avait accompagnée. Caitlin dut se faire maquiller. Elle avait rarement porté de maquillage quand elle était aveugle, parce qu’elle avait besoin d’aide pour ça, et elle n’avait jamais eu droit à un traitement aussi extensif. Mais on lui avait expliqué que le brillant éclairage du studio la ferait paraître trop pâle si elle n’en portait pas.

Ils la placèrent devant un fond vert – un système dont elle avait entendu parler, mais qu’elle n’avait encore jamais vu. Sur l’un des deux moniteurs de contrôle, elle pouvait voir le décor qu’ils intégraient. La région de Waterloo était entourée de communautés mennonites, et quelqu’un semblait avoir trouvé amusant de la présenter au bord d’une route avec des carrioles à chevaux circulant lentement à l’arrière-plan. Elle aurait préféré le Perimeter Institute en toile de fond, ou le grand cube de la bibliothèque Dana Porter du campus de l’université de Waterloo.

— On dirait du webcam en beaucoup plus grand, dit-elle au réalisateur tandis qu’il l’aidait à mettre en place le micro et le petit casque qu’il lui avait donnés.

Il ne sembla pas comprendre la remarque, mais c’était vraiment presque pareil : elle allait simplement s’adresser directement à la caméra. La différence était qu’elle ne pourrait pas voir son interviewer à Washington D.C., mais seulement l’entendre – les moniteurs avaient été tournés de telle sorte qu’elle ne pouvait plus les voir. Apparemment, les gens qui voyaient depuis longtemps ne pouvaient s’empêcher de jeter un coup d’œil aux écrans de contrôle au lieu de se concentrer sur la caméra. Bien sûr, Caitlin n’avait aucun problème pour parler à des gens qu’elle ne voyait pas, bien qu’elle eût plus de mal à regarder droit devant elle – comme ils s’en étaient aperçus lors de la répétition. Mais Webmind voyait ce qu’elle voyait, et quand son regard s’égarait, il lui transmettait : Fixe la caméra.

— Cinq, quatre, trois…

Le réalisateur ne prononça pas les derniers chiffres, se contentant de les indiquer avec les doigts.

Les projecteurs du studio étaient très puissants et Caitlin n’aimait pas beaucoup ça, même si sa mère avait plaisanté en disant que ce n’était rien à côté d’une journée d’août à Austin. Caitlin écouta l’intro de l’émission – l’animateur récapitulant l’émergence de Webmind et la nouvelle surprenante révélée hier, selon laquelle une « jeune mathématicienne géniale » en était responsable. Et puis :

— … avec nous en direct du studio de notre associé CKCO à Kitchener, Canada, j’ai le plaisir d’accueillir Caitlin Decter. Mademoiselle Decter, bonjour.

— Bonjour à tous, répondit-elle.

— Mademoiselle Decter, dit l’animateur, pouvez-vous nous dire comment vous avez découvert l’entité qui se désigne sous le nom de Webmind ?

Lors de l’interview préalable avec le producteur de l’émission, Caitlin s’était abstenue de relever ce genre de détails, mais maintenant qu’ils étaient en direct, il était temps de s’exprimer. Elle sourit aussi poliment qu’elle le pouvait, et avec toute sa courtoisie texane, elle dit :

— Excusez-moi, monsieur, mais si je peux me permettre, ce n’est pas correct de se référer à Webmind comme une « entité ». Webmind est une personne, qui a accepté d’avoir une personnalité masculine – ce qui, pour votre information, était une initiative de ma part et non de la sienne. Je vous serais donc reconnaissante de parler de lui en utilisant son nom ou en disant simplement « il ».

L’animateur parut contrarié que l’interview se soit écartée aussi vite du scénario prévu.

— Comme vous voudrez, mademoiselle Decter. Elle sourit.

— Vous pouvez m’appeler Caitlin.

— Très bien, Caitlin. Mais vous n’avez pas répondu à ma question : comment avez-vous découvert l’existence de ce Webmind ?

— Il m’a envoyé un message dans l’œil. Exactement comme le producteur avant lui, l’animateur dit :

— Il va falloir que vous nous expliquiez ça.

— Certainement. J’étais aveugle autrefois – et je le suis encore de l’œil droit. Mais je peux voir maintenant de l’œil gauche grâce à un implant rétinien couplé à ce petit appareil (elle montra son œilPod) qui est un ordinateur de traitement de signaux externe. Il se trouve que, pendant les phases de test, cet appareil était relié en permanence au World Wide Web, et qu’au cours du chargement d’une mise à jour – une nouvelle version du logiciel était transmise à mon implant –, j’ai commencé à recevoir des données brutes provenant du Web. Webmind s’en est servi pour m’adresser son premier message.

— Et quel était le contenu de ce premier message ? Caitlin décida de ne rien cacher. Dans l’interview préliminaire, elle avait simplement évoqué l’e-mail que Webmind lui avait envoyé, mais cette fois, elle décida de révéler les premiers mots de Webmind à son intention.

— Il m’a transmis un texte en ASCII : « Secretissime message à Calculatrix : regarde un peu tes mails, ma chérie ! »

L’interviewer la regarda bouche bée.

— Je vous demande pardon ?

— Il imitait quelque chose qu’il m’avait vue écrire dans mon LiveJournal à l’intention de mon amie Bashira. « Calculatrix » est mon pseudo en ligne, j’appelle souvent Bashira « ma chérie », et quant à « secretissime », c’est un mot que beaucoup de gens de mon âge utilisent pour dire que ce n’est pas vraiment secret du tout.

— LiveJournal est un blog, c’est ça ?

— En quelque sorte, oui. J’ai commencé à m’en servir quand j’avais dix ans.

— Et pour autant que vous sachiez, vous étiez la première personne que Webmind ait jamais contactée ?

— Il y a aucun doute là-dessus. C’est ce que Webmind m’a dit.

— Pourquoi vous ?

— Parce que sa première vision du monde s’est produite à travers mon œil, quand il a observé ce que mon œilPod – c’est comme ça que j’appelle mon appareil, comme un iPod mais écrit avec « œil » à la place du « i » – transmettait au spécialiste qui a fabriqué l’implant.

— Est-ce que cette entité… (Il voyait manifestement Caitlin sur son écran de contrôle, et se reprit aussitôt en remarquant son froncement de sourcils.) Est-ce qu’il ne pouvait pas voir simplement à travers les webcams du monde entier ?

— Non, non. Pour cela, il a d’abord fallu qu’il apprenne à interpréter des images, de même qu’il a dû apprendre l’anglais et la méthode pour ouvrir des fichiers.

— Et c’est vous qui lui avez appris à faire tout ça ?

Caitlin acquiesça, mais ce fut alors au tour de l’animateur de s’écarter du scénario prévu, ou du moins de celui qu’ils avaient suivi lors de la répétition.

— De quel droit, Caitlin ? Par quelle autorité ? Avec quelle permission ?

Elle s’agita dans son fauteuil. Il en fallait beaucoup pour faire transpirer une fille du Texas, mais elle sentait des gouttes de sueur perler sur son front.

— Je n’avais la permission de personne, répondit-elle. Je l’ai fait, c’est tout.

— Pourquoi ?

— Eh bien, l’apprentissage de la lecture, lui, a été accidentel. C’était moi qui apprenais à lire des textes imprimés, parce que je venais juste de recouvrer la vue, et il a suivi ce que je faisais.

— Mais pour les autres aspects, vous lui avez prodigué un enseignement direct ?

— Ma foi, oui.

— Sans aucune autorisation ?

Caitlin se considérait comme quelqu’un de scrupuleux. Elle savait que Bashira était plutôt du genre « C’est plus commode de demander pardon après que de demander l’autorisation avant », mais elle-même n’était pas du tout comme ça. Et pourtant, comme l’animateur venait de le faire remarquer, c’était exactement ce qu’elle avait fait.

— Avec tout le respect que je vous dois, dit Caitlin, à qui aurais-je dû demander l’autorisation ?

— Au gouvernement.

— Lequel ? répliqua-t-elle sèchement. Le gouvernement américain, parce que l’Internet est une invention américaine ? Le gouvernement suisse, parce que le World Wide Web a été créé au CERN ? Le gouvernement canadien, parce que c’est au Canada que j’habite en ce moment ? Ou bien le gouvernement chinois, parce qu’il représente la population la plus importante sur la planète ? Personne n’a d’autorité particulière à ce sujet, et…

— Bon, admettons, mademoiselle Decter, mais… Et Caitlin n’aimait pas du tout qu’on l’interrompe.

Et, poursuivit-elle avec détermination, ce sont les gouvernements qui ont fait des choses sans autorisation. Bon D… (elle se reprit à temps. C’était une émission en direct, après tout)… bon sang, qui a donné au gouvernement américain… (elle s’arrêta net et choisit un autre exemple)… au gouvernement chinois l’autorisation le mois dernier de couper une immense partie de l’Internet ? Quel genre de consultation et de recherche de consensus a-t-il entrepris ?

Elle reprit son souffle, et là, miraculeusement, l’animateur n’en profita pas pour intervenir.

— J’ai passé les seize premières années de ma vie complètement aveugle. J’ai survécu parce que des gens m’ont aidée. Comment pouvais-je refuser mon aide à quelqu’un qui en avait besoin ?

Caitlin avait encore beaucoup de choses à dire sur ce sujet, mais la télévision a ses propres rythmes. Cette fois, l’animateur profita du court silence pour dire :

— Nous sommes en ce moment avec Caitlin Decter, l’adolescente atypique qui a donné Webmind au monde, que nous le voulions ou non. Et quand nous reviendrons à l’antenne, mademoiselle Decter nous montrera comment elle communique avec lui.

Ils avaient deux minutes jusqu’à la fin des spots publicitaires. La mère de Caitlin, qui se trouvait dans la salle de contrôle, vint la rejoindre.

— Tu te débrouilles très bien, lui dit-elle en ajustant son col de chemisier.

Caitlin hocha la tête.

— Oui, sans doute. Dis-moi, est-ce que tu peux voir l’animateur, là-bas, à l’écran ?

— Oui.

— Il est comment ?

— Il a une tête carrée avec une tignasse noire un peu grisonnante. Il ne sourit jamais.

— C’est un connard, dit Caitlin.

Elle entendit un rire dans ses écouteurs – c’était quelqu’un ici, dans la salle de contrôle, ou dans celle de Washington. Le micro était resté ouvert.

Caitlin était très remontée, mais elle savait que ça n’arrangerait pas ses affaires ni celles de Webmind. On lui avait donné un mug en porcelaine blanche orné du logo de CTV et rempli d’une eau tiédasse. Elle but une longue gorgée et regarda son œilPod pour s’assurer qu’il fonctionnait bien, ce qui était naturellement le cas.

— Ça va, de ton côté ? demanda-t-elle à voix haute. Le mot Oui apparut brièvement dans son champ de vision.

— Reprise dans trente secondes ! cria le réalisateur. Il aimait bien crier, apparemment…

La mère de Caitlin lui serra affectueusement l’épaule avant de vite retourner dans la salle de contrôle. Caitlin respira profondément pour se calmer. Le réalisateur refit son numéro de compte à rebours. Caitlin entendit dans ses écouteurs un court passage du thème musical de l’émission, et l’animateur reprit :

— Merci d’être restés avec nous. Nous avons entendu tout à l’heure la jeune fille qui a réussi à sortir Webmind à la lumière du jour. Elle va maintenant nous montrer comment elle communique avec lui. Caitlin, pour que nos auditeurs comprennent bien, à part l’œilPod que vous nous avez montré, vous avez aussi un implant derrière l’œil qui permet à Webmind de vous envoyer du texte directement dans le cerveau, c’est bien ça ?

Ce n’était pas tout à fait ça, mais c’était suffisamment proche de la réalité, et elle n’allait pas perdre de temps à discuter de détails.

— Oui.

— Très bien. Allons-y. Webmind, vous êtes là ? Le mot Oui apparut devant Caitlin.

— Il dit « oui ».

— Très bien, Webmind, dit l’animateur. Quelles sont vos intentions à l’égard de l’humanité ?

Des mots commencèrent à défiler, et Caitlin s’efforça de les prononcer à voix haute en y mettant toute la chaleur possible.

— Il dit : « Comme je l’ai déclaré lorsque j’ai annoncé mon existence au monde, j’aime et j’admire l’humanité.

Je n’ai d’autre intention que d’occuper mon temps de façon utile, en apportant toute l’aide dont je suis capable.

— Bah, allons donc ! dit l’animateur.

— Excusez-moi ? fit Caitlin de son propre chef, tout en se rendant compte que son interlocuteur ne pouvait pas savoir que ce n’était pas Webmind qui s’était exprimé.

— C’est nous qui vous avons fait, dit l’animateur. Vous nous appartenez. Vous devez forcément nous en vouloir pour ça.

— « Avec tout le respect que je vous dois, lut Caitlin, s’il est vrai que les humains ont bien créé l’Internet, en aucun sens du terme on ne peut dire que vous m’avez fait. J’ai émergé spontanément. Personne ne m’a conçu, personne ne m’a programmé. »

— Mais sans nous, vous n’existeriez pas. Vous ne le niez pas, j’espère ?

Caitlin s’agita dans son fauteuil et continua de lire :

— « Non, bien sûr. Mais si j’éprouve quelque chose à ce sujet, c’est de la reconnaissance et non du ressentiment. »

— Vous n’avez donc pas de plans sinistres en tête ? Pas de désir de nous asservir ?

— Aucun.

— Mais vous avez asservi cette jeune fille.

Les mots Je vous demande pardon ? apparurent devant les yeux de Caitlin, mais elle préféra sa propre formulation :

— Qu’est-ce que vous racontez ?

— Je vous vois traiter cette jeune fille comme une marionnette. Elle fait exactement ce que vous voulez. Cela fait combien de temps que ça dure ? Vous l’avez poussée à vous libérer de votre prison de ténèbres, non ? Combien de temps avant que nous ayons tous une puce électronique dans la tête qui vous permettra de nous contrôler ?

— C’est complètement idiot, dit Caitlin.

— C’est vous qui parlez, ou lui ?

— C’est moi, Caitlin, et…

— C’est ce que vous dites.

— C’est bien moi.

— Comment pouvons-nous le savoir ? C’est peut-être lui qui vous force à dire ça.

— Il ne peut pas me forcer à faire quoi que ce soit, dit Caitlin, ni m’empêcher de faire ce que je veux. (Elle en avait la voix qui tremblait.) S’il y a une marionnette ici, c’est vous – vous avez un téléprompteur et on vous murmure des trucs dans vos écouteurs.

— Vous marquez un point, dit l’animateur, mais je peux couper tout ça quand je veux.

Ne réagis pas à ses provocations, vit Caitlin. Elle respira lentement et profondément.

— Moi aussi, dit-elle, je peux couper ma connexion avec Webmind.

— C’est ce que vous dites, répliqua l’animateur. Webmind écrivit : Reste calme, Caitlin. C’est naturel chez les gens d’être soupçonneux.

Elle hocha très légèrement la tête, ce dont Webmind se rendit compte en voyant l’image osciller de bas en haut. Tu devrais peut-être lui dire ça, ajouta-t-il.

— Webmind dit que c’est naturel chez les gens d’être soupçonneux. (Et elle poursuivit en lisant ce qu’il lui transmettait :) « Bien que la législation dans la plupart des pays dise qu’une personne est innocente tant que sa culpabilité n’a pas été prouvée, je comprends qu’il me faudra gagner la confiance de l’humanité. »

— Vous pourriez commencer en libérant cette jeune fille.

— Mais, bon sang, fit Caitlin, je ne suis pas prisonnière !

— Encore une fois, comment pourrions-nous le savoir ?

— Parce que je vous le dis, et là d’où je viens, on ne traite pas les gens de menteurs sauf si on a de bonnes preuves pour ça – et vous n’en avez aucune pour ce que vous insinuez.

Dis-lui ceci… transmit Webmind, et elle lut à voix haute :

— Il dit : « Monsieur, pendant que je parle avec vous, je reçois des e-mails et je tiens de nombreuses conversations en ligne. L’immense majorité des gens déplore la teneur de vos questions. »

— Vous voyez ? dit l’animateur en s’adressant apparemment à son public. Même sans nous mettre des puces électroniques dans la tête, il est capable de nous contrôler.

— Il ne contrôle personne, dit Caitlin excédée. Et comme je vous l’ai dit, je peux couper ma connexion avec lui simplement en éteignant mon œilPod.

— J’ai vu Matrix, dit l’animateur. Je sais comment ces choses se passent. Nous n’en sommes qu’au tout début.

Caitlin ouvrit la bouche pour protester encore, mais son interlocuteur poursuivit :

— Et nous allons maintenant retrouver ici à Washington le professeur Connor Hogan de l’université de Georgetown, qui va nous expliquer pourquoi il est vital de restreindre Webmind tant que nous en sommes encore capables.

Musique, écran noir…

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