Mona

Frank amena Mona dans la grotte paternelle et nous laissa seuls.

Au début, la conversation fut hésitante. J’étais intimidé.

Sa robe était diaphane. Sa robe était d’azur. C’était une longue robe toute simple, légèrement prise à la taille par un fil arachnéen. Tout le reste était mis en forme par Mona elle-même. Ses seins étaient comme des grenades ou tout ce que vous voudrez, mais surtout comme des seins de jeune femme.

Ses pieds étaient presque nus. Les ongles en étaient délicatement soignés. Ses légères sandales étaient d’or.

— Comment… comment allez-vous ? demandai-je.

Mon cœur battait la chamade. Le sang bouillait dans mes oreilles.

— Il n’est pas possible de faire une erreur, m’assura-t-elle.

J’ignorais que c’était là la formule de politesse qu’utilisent tous les bokononistes lorsqu’ils rencontrent une personne timide. Je répondis donc en me lançant dans une discussion fiévreuse sur la possibilité de faire ou non des erreurs.

— Mon Dieu, vous n’avez pas idée du nombre d’erreurs que j’ai déjà commises. Vous avez devant vous le champion du monde des erreurs. (Et je continuai de parler comme un étourdi.) Savez-vous ce que Frank vient de me dire ?

— À mon sujet ?

— À propos de bien des choses, mais surtout à votre sujet.

— Il vous a dit que vous pouviez m’avoir si vous le vouliez.

— Oui.

— C’est exact.

— Je… je… je…

— Oui ?

— Je ne sais plus quoi dire.

— Boko-maru vous aiderait.

— Quoi ?

— Déchaussez-vous, dit-elle d’un ton sans réplique.

Et elle ôta ses sandales avec une grâce suprême.

Je suis un homme qui connaît la vie, ayant calculé une fois que j’avais possédé plus de cinquante-trois femmes. Je puis dire que j’ai vu des femmes se déshabiller de toutes les façons possibles. J’ai vu le rideau s’ouvrir sur toutes les variations du dernier acte.

Et pourtant, la seule femme qui m’ait arraché un gémissement involontaire n’a rien fait de plus qu’enlever ses sandales.

J’essayai de délacer mes chaussures. Jamais jeune marié ne fut plus pitoyable. J’ôtai une chaussure, mais je fis un nœud serré avec le lacet de l’autre. Je cassai l’ongle de mon pouce sur le nœud. Finalement, j’arrachai la chaussure sans la délacer.

Puis vinrent mes chaussettes.

Mona était déjà assise à même le sol, jambes étendues, ses bras arrondis écartés derrière elle pour supporter le poids du corps, la tête rejetée en arrière, les yeux clos.

Il m’appartenait désormais d’accomplir mon premier – mon premier – mon premier… oh ! mon Dieu… !

Boko-maru.

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