37. SEULE ET ABANDONNÉE

À son éveil, Nicole ne pouvait avoir des pensées cohérentes. Des élancements ébranlaient son crâne, son dos et ses jambes, et elle ne gardait aucun souvenir de ce qui lui était arrivé. Elle réussit non sans peine à prendre sa gourde et boire une gorgée d’eau. J’ai dû subir une commotion cérébrale, comprit-elle avant de se rendormir.

Il faisait nuit, quand elle rouvrit les paupières. Mais le brouillard s’était levé dans son esprit. Elle savait où elle était. Elle se rappelait avoir cherché Takagishi et perdu l’équilibre, appelé Francesca et fait une chute angoissante. Elle décrocha aussitôt le com de son ceinturon.

— Cosmonaute Desjardins à équipe Newton, dit-elle en se relevant. J’ai été, eh bien, impossible à joindre me paraît être le terme qui convient le mieux. Je suis tombée dans un trou et j’ai perdu connaissance. Sabatini sait où je me trouve…

Elle interrompit son monologue pour attendre une réponse. En vain. Elle augmenta le volume mais ne capta que des parasites. Il fait nuit, et le jour n’était pas levé depuis plus de deux heures. Les journées raméennes duraient une trentaine d’heures. Était-elle restée inconsciente aussi longtemps ? Le cycle diurne et nocturne de Rama s’était-il modifié de façon imprévisible ? Elle regarda sa montre où s’affichait le temps écoulé depuis leur deuxième sortie et effectua un rapide calcul mental. Il y a trente-deux heures que je moisis au fond de ce puits. Pourquoi ne sont-ils pas venus me chercher ?

Elle reconstitua ce qui s’était passé une minute avant sa chute. Wakefield les avait contactées par radio et elle était allée s’assurer que Takagishi ne gisait pas au fond d’une des fosses. Richard relevait systématiquement la position de ses interlocuteurs dès qu’il établissait une communication et Francesca savait avec précision où elle était…

Avait-il pu arriver malheur à tous ses compagnons ? Sinon, qu’attendaient-ils pour venir la secourir ? Un sourire ironique incurva ses lèvres comme elle tentait de repousser une onde de panique. Ils ont dû me trouver et croire que la chute a été fatale… Une autre voix intérieure lui rétorqua qu’un tel raisonnement était absurde. S’ils étaient arrivés jusqu’à elle ils l’auraient retirée de ce puits morte ou vive.

La crainte de finir ses jours en ce lieu la fit frissonner et elle chassa de telles pensées en dressant une liste des dommages corporels subis. Elle tâta l’arrière de son crâne et répertoria diverses bosses, dont une sur la nuque. Voilà la responsable de ma commotion cérébrale, supposa-t-elle. Mais elle ne découvrit aucune fracture et le sang avait cessé de couler sur son cuir chevelu bien des heures plus tôt.

Elle examina ses bras, ses jambes et son dos. Les ecchymoses étaient nombreuses mais les os semblaient par miracle intacts. Les élancements douloureux à la base de son cou étaient symptomatiques d’un tassement de vertèbres, ou d’un nerf pincé. Elle s’en remettrait. Que son corps fût pratiquement indemne lui rendit courage.

Elle étudia son nouveau domaine. Elle était tombée dans un puits rectangulaire, qu’elle mesura en pas : six de long sur un et demi de large. En tenant sa lampe a bout de bras, elle lui attribua une profondeur de huit ou neuf mètres.

Elle remarqua dans un angle de la fosse un tas de petits bouts de métal dont les dimensions variaient de cinq à vingt centimètres. Elle s’en approcha pour les examiner à la lumière de sa torche. Il devait y avoir une centaine de pièces d’une douzaine de modèles différents : longues et étroites, incurvées, articulées. L’ensemble faisait penser aux déchets industriels d’une aciérie.

Les parois du puits étaient verticales et sans aspérités. Le matériau de construction était frais au toucher, comme un composite de métal et de roche. Il n’avait aucune irrégularité, pas la moindre saillie qui lui eût servi de prise, rien dont elle aurait pu s’aider pour se hisser jusqu’au niveau du sol. Nicole tenta d’en faire sauter quelques éclats à l’aide des ustensiles de sa trousse médicale mais n’arriva même pas à rayer sa surface.

Découragée, elle retourna vers la pile de débris dans l’espoir d’y trouver de quoi improviser une échelle ou un échafaudage. Elle dut rapidement renoncer. Les bouts de métal étaient trop petits et fins. Un rapide calcul mental lui confirma qu’ils ne supporteraient pas son poids.

Elle se sentit encore plus déprimée lorsqu’elle décida de prendre un repas. Elle avait réduit ses provisions au strict minimum afin d’emporter tout ce qui lui serait peut-être nécessaire pour soigner Takagishi et même en se rationnant de façon draconienne sa réserve d’eau ne durerait qu’un jour, celle de nourriture que trente-six heures.

Elle dirigea le faisceau de sa torche vers le haut. Le rayon se refléta sur le toit du hangar et les événements qui s’étaient déroulés avant sa chute lui revinrent à l’esprit. Le signal radio s’était brusquement amplifié à sa sortie du bâtiment. C’est le bouquet, se dit-elle. L’intérieur de cette grange est une zone de black-out complet. Il n’est pas étonnant que mes appels soient restés sans réponse.


* * *

Elle finit par s’endormir. Huit heures plus tard, elle s’éveilla en sursaut d’un rêve angoissant. Elle était de retour en France, assise en compagnie de son père et de sa fille dans un joli restaurant de province, par une magnifique journée de printemps. Nicole admirait les fleurs du jardin quand le serveur arriva et posa les escargots noyés dans du beurre et du persil devant Geneviève. Pierre avait commandé du coq au vin. L’Homme leur fit un sourire et repartit. Nicole finit par comprendre que rien n’était prévu pour elle…

Elle n’avait encore jamais été tenaillée par la faim. Même pendant le Poro, quand les lionceaux étaient partis avec ses provisions, elle n’en avait pas véritablement souffert. Avant de s’endormir, la fillette avait décidé de rationner ce qui subsistait mais l’épreuve n’était à aucun moment devenue vraiment pénible. Elle revint au présent et déchira les sachets de nourriture. Ses mains tremblaient. Elle dut faire un effort de volonté pour ne pas tout manger. Elle mit ses maigres restes dans leurs emballages et les fourra dans une poche avant d’enfouir son visage entre ses paumes. Et elle pleura, pour la première fois depuis sa chute.

Elle renonça à nier que mourir d’inanition était une fin horrible et tenta d’imaginer ce que ressentait celui que la faim affaiblissait puis finissait par achever. Était-ce graduel, passait-on par des stades successifs de plus en plus atroces ? Il ne me reste qu’à espérer que ce sera rapide, dit-elle à haute voix. Elle avait momentanément renoncé à l’espoir. Elle voyait briller dans le noir le cadran de sa montre digitale où s’égrenaient les dernières minutes de son existence.

Plusieurs heures s’écoulèrent ainsi. Assise dans un angle de ce puits glacial, la tête basse, Nicole s’affaiblissait et s’abandonnait au découragement. Elle allait se résigner à sa fin prochaine quand une voix pleine d’optimisme s’éleva en elle pour lui rappeler que chaque seconde de vie était précieuse et merveilleuse, que le simple fait d’avoir conscience d’exister était un miracle extraordinaire de la nature. Elle inspira à fond et rouvrit les yeux. Si je dois mourir ici, se dit-elle, autant que ce ne soit pas en me morfondant. Elle décida de consacrer le peu de temps qu’elle avait encore devant elle à se remémorer les instants les plus importants des trente-six années de sa vie.

Nicole conservait un mince espoir d’être sauvée, mais elle avait toujours été pragmatique et elle savait qu’en toute logique son avenir devait se mesurer en heures. Au cours du voyage qu’elle effectua sans hâte dans le royaume de ses souvenirs, il lui arriva plusieurs fois de pleurer sans aucune honte : des larmes de joie dues au bonheur de revivre de tels instants, mais aussi douces-amères car c’était sa dernière visite dans ces chambres fortes de sa mémoire.

Cette excursion dans son passé ne suivait pas un parcours logique. Elle s’abstenait de trier, juger ou comparer ses expériences. Elle se contentait de les revivre, dans l’ordre où se présentaient ces épisodes de sa vie sublimés par l’éveil de sa conscience.

Sa mère y occupait une place particulière. Parce que Nicole l’avait perdue à l’âge de dix ans, elle conservait à ses yeux tous les attributs d’une reine ou d’une déesse. Anawi Tiasso avait été une femme très belle, une Africaine noir de jais d’une stature peu commune. Une aura lumineuse nimbait toutes les images que Nicole gardait d’elle.

Elle se la rappela, assise dans la salle de séjour de leur maison de Chilly-Mazarin et lui faisant signe de venir s’installer sur ses genoux. Chaque soir, avant l’heure du coucher, Anawi lui lisait une histoire, presque toujours un conte de fées avec des princes, des châteaux et des héros heureux et beaux qui venaient à bout de tous les obstacles placés sur leur chemin. Sa voix était douce et apaisante. Sitôt que les paupières de sa petite fille commençaient à s’alourdir, elle interrompait son récit pour lui chanter des berceuses.

À l’époque de son enfance, les dimanches avaient un statut particulier. Au printemps, elles allaient dans le parc pour jouer sur les grandes pelouses. Sa mère lui apprenait à courir. Nicole n’avait jamais vu personne posséder autant de grâce qu’Anawi, qui avait été autrefois une championne internationale.

Elle se rappelait tous les détails de son voyage avec Anawi en Côte-d’Ivoire, pour le Poro. C’était entre les bras de sa mère qu’elle s’était blottie au cours des nuits passées à Nidougou, avant la cérémonie. Pendant cette longue période d’angoisse où il lui avait fallu repousser l’assaut de toutes ses frayeurs, sa mère avait répondu avec patience à toutes ses questions en lui rappelant que la plupart des filles de leur tribu avaient passé cette épreuve sans trop de difficultés.

Son meilleur souvenir de ce voyage était celui de leur chambre d’hôtel d’Abidjan, la veille de leur retour à Paris. Elles n’avaient pratiquement pas parlé du Poro depuis la fin de la cérémonie et Nicole attendait toujours d’être complimentée pour ses exploits. Omeh et les doyens du village lui avaient déclaré qu’elle s’était comportée admirablement, mais pour une fillette de sept ans seules importaient les louanges de sa mère. Juste avant le dîner, elle avait réuni tout son courage pour lui demander, d’une voix hésitante :

— Alors, maman, est-ce que je m’en suis bien tirée ? Je veux parler du Poro.

Des larmes faisaient briller les yeux d’Anawi.

— Si tu t’en es bien tirée ? Si tu t’en es bien tirée ? Elle l’avait prise dans ses longs bras fuselés pour la soulever du sol et la lever au-dessus de sa tête.

— Oh, ma chérie ! Je suis si fière de toi que j’en pleure. Et elles étaient restées ainsi à s’étreindre, rire et pleurer de bonheur pendant près d’un quart d’heure.


* * *

Nicole s’était allongée sur le dos au fond du puits et des larmes coulaient sur ses joues. Elle venait de consacrer une heure à penser à sa fille, de sa naissance à l’instant présent. Elle avait suivi un parcours jalonné par les événements les plus marquants de la vie de Geneviève, dont ce voyage en Amérique effectué trois ans plus tôt. Geneviève était alors âgée de onze ans. Qu’elles avaient été proches tout au long de ce périple, surtout dans le Grand Canyon, lors de la descente du sentier de South Kaibab.

Elles s’étaient fréquemment arrêtées pour admirer l’empreinte que le passage de deux milliards d’années avait laissée à la surface de la Terre. Elles s’étaient juchées sur un promontoire qui surplombait le désert aride du plateau de Tonto. Le soir, elles avaient étalé leurs sacs de couchage côte à côte, au bord de l’imposante Colorado River. Et elles avaient discuté et commenté leurs rêves en se tenant par la main tout au long de la nuit.

Je n’aurais jamais fait ce voyage si tu n’avais pas insisté, pensa Nicole en s’adressant à son père. Tu savais que le moment était idéal. Pierre Desjardins était la clé de voûte de son univers, à la fois son ami, son confesseur, son guide et son plus fervent supporter. Il avait été présent lors de sa naissance et de tous les épisodes importants de sa vie. C’était cet homme qui lui manquait le plus, alors qu’elle gisait au fond de ce puits, à bord d’un vaisseau venu d’une lointaine étoile. Elle eût aimé pouvoir lui parler une dernière fois.

Nul souvenir de son père ne dominait les autres, car cet homme avait participé à tous les événements de son existence. Tous n’étaient pas joyeux. Elle se rappelait le soir passé dans la savane, non loin de Nidougou, quand ils s’étaient tenus par la main sans rien dire, les yeux emplis de larmes, alors que les flammes du bûcher funéraire s’élevaient dans la nuit africaine. Et ce jour où il l’avait serrée dans ses bras, à quinze ans, pendant qu’elle sanglotait de déception après avoir appris qu’on ne voulait pas d’elle pour personnifier Jeanne d’Arc.

Elle était retournée vivre auprès de son père un an après la mort de sa mère et était restée avec lui jusqu’à la fin de sa troisième année d’études à l’université de Tours. C’était merveilleux. Nicole allait se promener dans les bois sitôt qu’elle revenait des cours à vélo, pendant que Pierre écrivait ses romans dans le cabinet de travail. Le soir, Marguerite utilisait la cloche pour les informer que le dîner était servi avant d’enfourcher sa propre bicyclette et d’aller retrouver son mari et ses enfants qui l’attendaient à Luynes.

L’été, ils parcouraient l’Europe. Pierre Desjardins allait visiter les villes médiévales et les châteaux qui servaient de cadres à ses récits. Nicole savait plus de choses sur Aliénor d’Aquitaine et son second mari, Henri Plantagenêt, que sur les leaders politiques actuels de la France et du reste de l’Europe occidentale. En 2181, il avait obtenu le prix Marie Renault de la meilleure fiction historique et elle l’avait accompagné à Paris pour la remise de sa récompense. Assise au premier rang du grand auditorium, vêtue d’une jupe et d’un chemisier blancs, elle avait écouté l’orateur faire le panégyrique de son père.

Elle aurait pu réciter de mémoire les principaux passages du discours de remerciement de Pierre. À la fin, il avait déclaré : « On m’a fréquemment demandé si j’ai acquis une sagesse que j’aimerais faire partager aux générations futures. » Il l’avait alors fixée droit dans les yeux. « Ce que j’ai à dire à ma fille et à tous les jeunes est très simple. Au cours de ma vie, j’ai découvert deux choses dont la valeur est inestimable… la connaissance et l’amour. Rien d’autre – ni la célébrité, ni la puissance, ni la réussite en soi – ne leur est comparable. Car celui qui peut dire quand sa vie s’achève « J’ai appris et j’ai aimé » peut également affirmer : « J’ai été heureux. »

J’ai été heureuse, pensa-t-elle en versant d’autres larmes. Grâce à toi. Tu m’as constamment soutenue. Même dans les moments les plus pénibles. Elle se rappela l’été 2184, quand le rythme de son existence s’était à tel point emballé qu’elle avait lâché les rênes de sa destinée. En seulement six semaines elle avait remporté une médaille d’or aux jeux Olympiques, eu une liaison brève mais passionnée avec le prince de Galles et annoncé à son père qu’elle attendait un enfant.

Les événements clés de cette période étaient aussi nets dans son esprit que s’ils s’étaient produits la veille. Rien ne lui avait jamais procuré une joie plus intense que le fait de recevoir une médaille d’or et de se dresser sur le podium du stade de Los Angeles sous les ovations d’une centaine de milliers de spectateurs. C’était son instant de gloire. Pendant près d’une semaine elle avait été l’idole des médias. Elle faisait la une de tous les journaux et on parlait de son exploit dans toutes les émissions sportives.

Après sa dernière interview dans le studio de télévision du village olympique, un jeune Anglais au sourire engageant s’était présenté à elle. Darren Higgins lui avait remis une enveloppe qui contenait une invitation à dîner du prince de Galles, l’homme qui deviendrait un jour le roi Henry XI.

La soirée a été magique, se souvint-elle en oubliant pour un temps sa situation désespérée. Il s’est montré charmant. Les deux jours suivants ont été merveilleux. Mais trente-neuf heures plus tard, à son éveil dans la chambre de la suite d’Henry, ce conte de fées avait connu une fin brutale. Le prince, jusqu’alors si prévenant et tendre, semblait irrité et nerveux. La jeune femme inexpérimentée avait pris progressivement conscience que son beau rêve s’achevait. Je n’étais pour lui qu’une conquête parmi tant d’autres, une célébrité éphémère avec qui il aurait été malséant d’avoir des relations suivies.

Elle n’oublierait jamais ses dernières paroles, là-bas à Los Angeles. Pendant qu’elle faisait rapidement ses bagages, il tournait en rond dans la chambre et déclarait ne pas comprendre pourquoi elle paraissait bouleversée. Nicole s’abstenait de répondre à ses questions et le repoussait lorsqu’il voulait l’étreindre.

— Qu’avez-vous cru ? avait-il finalement demandé avec colère. Que nous enfourcherions mon fier destrier et partirions nous réfugier dans une chaumière pour y vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants ? Allons, Nicole, nous ne vivons pas dans un monde imaginaire. Vous savez que les Anglais n’accepteraient jamais d’avoir pour reine une métisse.

Elle s’était enfuie sans lui laisser le temps de voir ses larmes. Et c’est ainsi, ma Geneviève chérie, que je suis repartie de Los Angeles avec deux trésors : une médaille d’or dans mes bagages et toi dans mon ventre. Sans s’attarder sur les semaines d’angoisse qui avaient suivi, elle fit un bond jusqu’à l’instant de solitude et de désespoir où elle avait finalement trouvé le courage de tout dire à son père.

C’était par une matinée de septembre, dans le séjour de leur maison de Beauvois.

— Je… je ne sais plus quoi faire, lui avait-elle avoué. J’ai conscience de te décevoir – j’ai baissé dans ma propre estime – mais je voudrais savoir si tu accepterais que je m’installe ici pour…

— Bien sûr, Nicole, l’avait-il interrompue.

Et il pleurait, pour la première fois devant elle depuis la mort d’Anawi.

— Nous ferons tout ce qui est nécessaire, avait-il ajouté en la prenant dans ses bras.

J’ai eu tant de chance. Il a été si compréhensif. Il ne m’a adressé aucun reproche. Il ne m’a rien demandé. Quand je lui ai révélé qui était le père en précisant que je ne voulais pas qu’on le sache, surtout pas Henry et l’enfant, il s’est engagé à garder ce secret. Et il a tenu parole.

Les soleils se rallumèrent brusquement et Nicole se leva pour regarder sa prison sous leur clarté. Seul le centre de la fosse était éclairé, les deux extrémités restaient dans l’ombre. Elle fut surprise de se sentir si joyeuse et optimiste dans une situation aussi désespérée.

Elle leva les yeux vers le toit du bâtiment et le ciel de Rama visible au-delà. Elle pensa à sa fin prochaine et eut un brusque désir. Elle n’avait pas prié depuis une vingtaine d’années mais elle s’agenouilla dans le rai de lumière qui descendait au centre du puits. Mon Dieu, murmura-t-elle, je sais qu’il est un peu tard pour y penser, mais je tiens à Te remercier de m’avoir donné mon père, ma mère et ma fille, et toutes les joies que j’ai connues. Elle fixait le plafond, les lèvres incurvées par un sourire et les yeux brillants. Et à présent, mon Dieu, j’aurais grand besoin qu’on m’aide à sortir de là.

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