« Je n’ai jamais dit que ça marchait à tous les coups. » Cirocco mit les mains sur les hanches et scruta le ciel une nouvelle fois, sans plus de succès qu’auparavant. Gaby la regarda en éprouvant pour la première fois depuis des années ce désir irrationnel de voir la Sorcière accomplir quelque miracle. Elle avait beau savoir que les pouvoirs de la Sorcière ne fonctionnaient pas de cette façon. Elle aurait voulu qu’elle fasse pleuvoir.
« Elle avait promis de fournir une couverture nuageuse, remarqua Gaby.
— Elle a dit qu’elle essaierait, la corrigea Cirocco. Tu sais bien que Gaïa ne peut contrôler le temps dans ses moindres détails. C’est trop complexe.
— Alors, elle continue de l’affirmer. » Devant le regard que faisait Cirocco, Gaby garda pour elle le reste de sa remarque.
« Nous n’avons pas vu d’esprit pour le moment, dit Robin. Peut-être que les nuages ont suffi à leur flanquer la trouille avant de se dissiper.
— Ils sont probablement loin sous le sable », renchérit Hautbois.
Gaby ne dit rien. Elle saisit plutôt dans la sacoche de Cornemuse un fruit à vessie de la taille d’une balle de baseball.
Le groupe avait franchi les derniers vallonnements marquant les contreforts orientaux de la Ligne Bleu Roi. Non loin à l’est se dressait le câble central de Téthys avec, à peine visible derrière lui, le trait fin de la route périphérique de Gaïa. Un ultime avant-poste de roche nue formait droit devant eux une large cuvette emplie de sable dont la bordure était submergée en plus d’un endroit.
Debout sur le dos de Cornemuse et prenant appui d’une main sur l’épaule de Cirocco, Gaby projeta la vessie suivant un arc élevé qui l’amena au centre de la cuvette.
Les résultats furent spectaculaires : Neuf lignes divergèrent à toute vitesse du point d’impact. Il y avait une excroissance à l’avant de chaque trait et derrière une dépression peu profonde que le sable comblait à nouveau rapidement. Les excroissances se mouvaient avec la rapidité d’une taupe de dessin animé sous une pelouse de banlieue. En quelques secondes, il n’en restait plus trace.
Cirocco s’était dressée sur les genoux lorsque le projectile avait touché le sable. Elle se laissa retomber en position assise.
« Qu’est-ce que tu veux faire ? demanda-t-elle. Mettre cap à l’ouest vers Théa ?
— Non. Je suis sûre que tu te rappelles qui voulait faire ça et qui voulait rester à la maison.
— Et boire un coup », ajouta Cirocco.
Gaby l’ignora. « J’aurais l’air idiot à te conseiller d’éviter Téthys après avoir passé tout ce temps à te persuader simplement de venir. Voyons ce qu’on peut faire. »
Cirocco soupira. « Comme tu voudras. Mais faites gaffe, tous. Je veux que les humains surveillent le ciel. Les Titanides, gardez l’œil sur le sol. On peut en général voir une gerbe de sable avant que les esprits ne jaillissent à la surface. »
Lorsqu’elle avait neuf ans, Robin avait lu un livre qui devait lui laisser une impression durable. C’était l’histoire d’une vieille pêcheuse qui, seule dans son petit bateau, avait ferré un énorme poisson et luttait contre lui pendant des jours à travers vents et marées. Ce n’était pas tant le combat contre la bête qui l’avait terrorisée mais bien l’évocation de la mer : profonde, sombre, froide et sans merci.
Elle trouva curieux de ne pas s’être souvenue du livre alors qu’ils traversaient Nox ou Crépuscule. Il lui semblait encore plus étrange d’y penser à l’heure actuelle, en plein jour au milieu d’un désert aride. Et pourtant, le sable était une mer. Il ondulait en larges vagues. Dans le lointain, quelque perturbation atmosphérique le faisait scintiller comme du verre. Et sous la surface vivaient des monstres plus terribles encore que le poisson de la vieille femme.
« Je viens de penser à quelque chose », dit Cirocco. Elle chevauchait, seule, sur Cornemuse suivie par Robin sur Hautbois puis Chris et Gaby sur Valiha. « Nous aurions dû aller vers le nord pour gagner la route puis retourner à l’ouest jusqu’au câble. Ça aurait réduit le trajet sur le sable sec. »
Robin se remémora la carte dessinée par Cirocco.
« Mais on aurait passé plus de temps sur le plat, fit-elle remarquer.
— C’est vrai. Mais dans un sens, les esprits m’inquiètent plus que les bombourdons. »
Robin ne le dit pas mais elle partageait ce sentiment. Bien qu’elle fût censée scruter le ciel, son regard était sans cesse ramené vers les sabots de Hautbois qui soulevaient des panaches de sable. Elle ne parvenait pas à comprendre comment la Titanide pouvait le supporter. Elle-même avait les orteils qui se crispaient dans ses bottes à l’idée de ces horreurs. À tout moment une gueule immonde pouvait surgir et engloutir les jambes de la Titanide. Sauf que Cirocco lui avait dit que les esprits étaient dépourvus de bouche et se nourrissaient par absorption directe à travers leur carapace cristalline. Ils n’avaient même pas de visage…
« As-tu envie de faire demi-tour ? demanda Gaby.
— Je ne pense pas. Nous sommes presque à mi-chemin.
— Ouais, mais nous savons que derrière nous il n’y a pas d’esprits-de-sable…»
À peine Gaby avait-elle cessé de crier que les sens aiguisés de Robin l’avertirent que quelque chose n’allait pas. Elle avait une idée fort précise de ce que Gaby devait avoir vu et il ne lui fallut que quelques secondes pour repérer, sur le flanc de la dune de cinq mètres qui était derrière leur convoi, les sillons révélateurs dans le sable : profonds en tête puis s’évasant comme la queue d’une comète. Elle en vit une douzaine puis se rendit compte que c’était seulement le premier parmi cinq ou six groupes.
Il était inutile de sonner l’alarme : Robin vit Cirocco debout sur Cornemuse, le dos à la marche. Valiha pressa le pas pour se mettre à la hauteur de Hautbois et de Robin. Gaby passait des vessies à Chris et à Valiha.
« Passe-m’en une », dit Hautbois et Robin s’exécuta, sentant la Titanide presser le pas. Pour la première fois elle pouvait percevoir les tressautements associés généralement à la marche à cheval.
« Gardez vos munitions pour l’instant, dit Gaby. Ils ne peuvent pas se déplacer plus vite et nous les distançons aisément.
— Facile à dire pour toi », remarqua Valiha. Sa peau jaune moucheté était luisante de sueur et d’écume.
« Il est temps de changer, dit Hautbois. Valiha, passe-moi un peu Gaby. Robin, tu vas devant. » Robin fit ce qu’on lui disait en remarquant qu’elle se trouverait ainsi prise en sandwich entre Hautbois et Cornemuse ; et même s’il était douloureux de l’admettre, elle ne s’en plaignait pas. Ces esprits invisibles la terrorisaient plus que tout ce qu’elle avait pu rencontrer à Gaïa.
« Rien qu’une seconde », dit Gaby. Et sans tenir compte de ses propres instructions elle projeta une vessie dans la direction d’un groupe d’esprits. Ils la sentirent à cinquante mètres de distance. Certains firent un large crochet pour éviter la zone empoisonnée tandis que d’autres disparaissaient entièrement.
« Je les ai eus », dit Gaby avec satisfaction en atterrissant sur le dos de Hautbois. Elle se mit derrière Robin. « Ceux qui ont disparu se sont enfoncés plus profondément dans le sable mais ça va les ralentir considérablement. Ils ne peuvent foncer qu’à proximité de la surface, là où le sable est moins compact. » Robin regarda derrière et vit que ceux qui avaient fait un détour reprenaient tout juste la poursuite, derrière l’avant-garde.
« Et vous, les amis ? demanda Cirocco à l’adresse des Titanides. Êtes-vous capables de maintenir ce train jusqu’au câble ?
— Cela ne devrait pas poser de problème, lui assura Cornemuse.
— Alors, nous sommes sauvés, dit Gaby. Rocky, tu ferais bien de balancer devant nous une petite bombe de temps à autre. Ça devrait nous éviter les risques d’embuscade.
— Ça marche ! Robin, Chris, cessez de regarder par terre ! »
Robin se força à regarder vers le ciel, toujours aussi douloureusement dégagé et fort heureusement vide de bombourdons. C’était l’une des choses les plus difficiles qu’elle ait jamais faites. Cela n’aurait pas été pis si ses propres pieds avaient dû fouler cette horrible mer de sable ; à l’instar du passager arrière pressant un frein imaginaire, elle se surprit à lever les pieds dans un effort pour faire avancer Hautbois avec plus de prudence.
Le groupe avait atteint la crête d’une dune et s’apprêtait à la redescendre lorsque Cirocco lança un cri d’avertissement.
« À droite, toute, les gars ! Cramponnez-vous ! »
Robin étreignit le tronc de Hautbois tandis que la Titanide plantait ses sabots dans le sable et pivotait en basculant presque de quarante-cinq degrés. La progression devenait nettement plus heurtée à mesure que croissait la fatigue de Hautbois. Robin eut une brève vision du mouvement au pied de la dune, aperçut plusieurs traces révélatrices au moment où les esprits fuyaient la vessie qui venait d’exploser brusquement parmi eux. Une rigole d’eau dévala de derrière elle, tourna sur la gauche, chuinta en touchant son but. Il y eut un geyser de sable. Un instant, un tentacule souple et insubstantiel fouetta l’air. Lorsque l’eau la touchait la chose émettait un sifflement et se brisait en écailles de verre qui tourbillonnaient lentement dans la faible gravité. Robin se libéra une main et de l’autre empoigna la crosse de son pistolet à eau, en regardant par dessus les larges épaules de Hautbois. Elle pressa la détente et arrosa ce qui se révéla être un carré de désert sans aucun danger.
« Économise-la », avertit Gaby. Robin opina vivement, honteuse de voir l’arme trembler dans sa main. Elle espérait que Gaby ne le remarquait pas. Cette dernière parlait d’une voix calme et posée et donnait à Robin l’impression d’être âgée de dix ans.
Les Titanides avaient décrit un large cercle autour du nid d’esprits-de-sable dégagé par Cirocco ; elles reprenaient maintenant leur progression vers le câble de Téthys. Robin se rappela qu’il fallait regarder le ciel, ne vit rien, revint vers le sable, à nouveau se força à lever les yeux. Elle renouvela ce manège une heure durant, et pourtant la base du câble ne se rapprochait toujours pas. Finalement, elle demanda à Gaby depuis combien de temps ils couraient.
« Dix minutes environ », répondit-elle avant de regarder à nouveau derrière elle. Lorsqu’elle se retourna, elle fronçait les sourcils. Sur la crête d’une dune à cinq ou six cents mètres derrière eux, Robin crut apercevoir les traces d’un esprit. Il longeait les marques laissées par les sabots d’une Titanide. « Ils sont à nouveau derrière, Rocky. » La Sorcière regarda, fronça les sourcils puis eut un haussement d’épaules.
« Et après ? Ils ne peuvent pas nous rattraper si nous continuons d’avancer.
— Je sais. Et ils doivent le savoir aussi. Alors pourquoi persistent-ils ? »
Cirocco eut un nouveau froncement de sourcils et Robin n’aimait pas ça. Finalement, Gaby annonça qu’elle ne pouvait plus apercevoir leurs poursuivants. Malgré l’épuisement des Titanides, on convint de ne pas ralentir le pas tant qu’ils n’auraient pas gagné le câble.
Hautbois atteignit le sommet de la dernière dune géante avant le câble. Droit devant, Robin pouvait voir le terrain s’élever sans solution de continuité. Elle estima à un kilomètre la distance qui les séparait de l’obscurité bienvenue régnant sous les brins du câble.
« Bombourdon sur la droite, leur cria Chris. Ne mettez pas encore pied à terre. Il est encore loin. » Robin l’aperçut qui contournait le câble par l’est, à peut-être mille mètres de haut.
« Demi-tour derrière la dune, ordonna Cirocco. Je ne pense pas qu’il nous ait repérés. »
Hautbois virevolta et en moins de quelques secondes ils étaient tous les sept cachés de l’autre côté. Tous, sauf Robin.
« Descends, bougre d’idiote ! Qu’est-ce qui te prend ? » Elle était à genoux, penchée en avant, les mains touchant presque le sable.
Elle ne pouvait pas les mouvoir. Le sable lui semblait se contorsionner sous ses yeux. Elle ne pouvait se forcer à toucher cette chaleur répugnante, elle ne pouvait se résoudre à y coller son ventre en attendant l’arrivée des esprits.
Un grand poids s’abattit sur elle et elle poussa un hurlement. Elle hurla lorsqu’elle sentit le sable presser contre son corps puis se mit à vomir.
« C’est parfait », dit Hautbois en se relevant juste assez pour lui permettre de tourner la tête. « J’aurais voulu avoir cette idée. Toute cette humidité va les tenir à distance. »
Humidité, humidité… Robin ne perçut consciemment que ce seul mot et sans tarder bloqua son esprit sur cette unique pensée. Le sable était humide. L’humide tiendrait les monstres à distance. Sueur, larmes, crachat, vomi… voici que toutes ces choses devenaient recommandables. Elle étreignit le sable : comme il était merveilleusement humide !
« Que se passe-t-il ? Est-elle en train d’avoir une attaque ? cria Cirocco.
— J’en ai peur, dit Hautbois. Je vais m’occuper d’elle.
— Garde-la juste plaquée au sol. Il se peut qu’il ne nous ait toujours pas repérés. »
Robin entendit le bruit d’un bombourdon très haut, très loin. Elle tourna la tête, juste assez pour le voir apparaître derrière le sommet de la dune. Encore en hauteur, il fit un virage sec, révélant des ailes effilées de planeur, puis amorça sa descente dans leur direction.
« Le voilà ! cria Cirocco. Tout le monde à ras de terre. Il n’a pas le bon angle pour nous faire du mal. »
Ils contemplèrent le bombourdon avec un doute croissant jusqu’à ce qu’il devienne clair que la créature n’allait pas faire de passage en rase-mottes. Elle les survola à cinq ou six cents mètres, volant encore plus lentement que ne se le rappelait Robin.
« Cette chose m’a l’air singulière », émit Gaby en osant se lever un poil.
« T’occupe ! » coupa Cirocco en se redressant pour scruter le ciel. « Il s’apprête à repasser. Gaby, continue de l’observer et les autres, commencez à creuser. Je voudrais une large fosse de deux mètres de profondeur mais je me contenterai d’un mètre. Ça risque d’être dur dans le sable. Humidifiez-le avant de creuser. Oh, et si l’un de vous est pris d’un besoin pressant de pisser, qu’il le fasse tout de suite, pas de fausse pudeur ! Dans votre vessie, ça ne sert à rien. » Cirocco s’interrompit en voyant la tête que faisait Robin et en constatant que l’état dans lequel était la culotte de la jeune femme n’avait rien d’intentionnel.
Robin s’était déshonorée. Elle remercia la Grande Mère qu’aucune de ses sœurs n’ait été là pour le voir mais c’était une bien maigre consolation. Ces six-là étaient maintenant devenus ses sœurs pour la durée du voyage et sans doute au-delà.
Mais, si mal que vont les choses, elles peuvent toujours empirer. Robin put vérifier ce principe lorsqu’elle essaya de bouger et s’aperçut que c’était impossible. L’assertion de Hautbois – faite sans doute dans l’intention de préserver son amour-propre – s’était révélée exacte : elle était paralysée.
L’espace d’un instant elle crut vraiment qu’elle allait devenir folle. Elle était avachie par terre, sur le ventre, affalée sur le sable répugnant de Téthys, une surface qui la terrorisait au point qu’elle avait peut-être trahi tout le groupe par son incapacité à la toucher. Mais en guise de folie, ce fut un détachement plein de fatalisme qui l’envahit. Insouciante et sereine, elle percevait les bruits d’une activité frénétique sans y comprendre grand-chose. Quelle importance, si un esprit émergeait en dessous d’elle et commençait à la déchiqueter. Elle avait un goût de vomi dans sa bouche emplie de grains de sable. Elle sentit un filet de sueur glisser le long de son nez. Elle pouvait distinguer quelques mètres de sable et son propre bras étendu en travers. Elle écouta.
Cirocco : « Comme ils ne peuvent pas s’approcher, ils sont bien obligés d’employer une forme d’arme à moyenne portée. Au début, ils balançaient des cailloux mais depuis une dizaine d’années, ils utilisent une espèce d’arc ou d’arbalète. »
Chris : « Ce n’est pas réjouissant. On aura du mal à s’abriter dans ce sable. »
Cirocco : « Il y a du bon et du mauvais : ils étaient salement efficaces avec leurs cailloux. Ces êtres sont bâtis… bon, tu n’en as pas encore vu et ce n’est pas facile de les décrire, mais ils étaient très bons au jet de pierres. Seulement, dans le fond ce sont des trouillards et pour les lancer ils étaient obligés de s’approcher beaucoup. Avec des flèches, ils peuvent se tenir bien plus en retrait. »
Hautbois : « Maintenant, dites-nous vraiment le mauvais, Rocky. »
Cirocco : « C’était cela. Le bon, c’est qu’ils sont nuls en tir à l’arc. Ils sont incapables de viser. Alors ils se contentent de tirer au petit bonheur. »
Gaby : « Et ils se rattrapent en balançant des quantités de flèches. »
Hautbois : « Je savais bien qu’il y aurait un truc. » On entendit dans le lointain le vrombissement saccadé typique d’un bombourdon.
Gaby : « Je persiste à dire que cette créature a quelque chose de bizarre. Je distingue mal mais on dirait une protubérance sur son dos. » Cornemuse : « Je la vois, également. » Cirocco : « Vous avez une meilleure vue que moi. » Pendant quelques instants, on n’entendit plus que des bruits de respiration et parfois le crissement d’une reptation sur le sable. À un moment, Robin sentit quelqu’un lui effleurer la jambe. Puis Cornemuse lança un cri d’avertissement. Quelque chose tomba sur le sable dans l’angle de vision de Robin. Elle était juste en train d’examiner l’ongle de son pouce ; elle accommoda pour observer l’intrus. C’était une fine aiguille de verre, longue de cinquante centimètres.
L’une de ses extrémités était encochée, l’autre s’était fichée dans le sable.
« Quelqu’un de touché ? » C’était la voix de Cirocco. Il y eut quelques réponses négatives. « Ils ont simplement tiré en l’air. Ils doivent être derrière cette dune. Dans un moment ils trouveront le courage de jeter un œil par-dessus et leurs tirs se feront plus précis. Préparez vos frondes. » Peu après, Robin perçut la détente des armes titanides. Chris : « Je crois que tu as mis au but, Valiha. Oups ! Celles-ci ne sont pas passées loin ! »
Cirocco : « Bon Dieu ! Regardez Robin ! On ne peut pas faire quelque chose ? Ce doit être épouvantable. » Robin avait entendu la dernière volée de flèches toucher le sable, sentit quelques grains de sable lui fouetter la jambe. C’était sans aucune importance. Elle entendit de nouveaux frottements et une main saisit la flèche qu’elle avait contemplée, l’arracha et la jeta au loin. Le visage de Gaby apparut, à quelques centimètres du sien.
« Comment ça se passe, gamine ? » Elle prit le bras de Robin, l’étreignit puis lui tapota la joue. « Est-ce que ça serait plus facile si tu pouvais y voir mieux ? Je ne vois pas de moyen de te protéger sinon, j’en aurais fait profiter tout le monde.
— Non, répondit Robin, de très loin.
— Je voudrais… et merde. » Gaby écrasa le poing sur le sol. « Je me sens impuissante. J’imagine comment tu dois te sentir. » Devant l’absence de réponse de Robin, elle se pencha plus près.
« Écoute, ça t’embête si je t’emprunte ton arme quelques instants ?
— Je m’en fous.
— Est-ce qu’il te reste quelques-unes de ces balles-fusées ? Avec les têtes explosives.
— Trois chargeurs.
— J’en aurai également besoin. Je vais essayer de descendre un bombourdon si jamais il passe assez bas. Toi, tu tiens bon en essayant de ne penser à rien. On va tenter sous peu une percée vers le câble.
— Je vais très bien », dit Robin, mais Gaby était partie.
« Et c’est moi qui vous porterai », dit la voix de Hautbois, derrière elle. Elle sentit la main de la Titanide venir effleurer sa joue, qui était humide. « Ne mesurez pas vos larmes, petite fille. Non seulement cela soulage l’âme, mais encore la moindre goutte nous protège tous. »