XXXIII La fuite


Tous les sept considéraient, perplexes, les trois couloirs qui s’offraient à eux.

– A mon avis, on est arrivés par celui de droite, déclara Gontrand.

– Ah bon ? répondit Agathe. Moi, j’aurais plutôt parié sur celui de gauche.

– C’est bon, j’ai compris, soupira Guillemot. Il va falloir une nouvelle fois faire confiance aux Graphèmes !

– Le problème, objecta Bertram en fronçant les sourcils, c’est qu’ils risquent de mettre du temps à venir.

– Je sais, répondit Guillemot. Mais, une fois de plus, on n’a pas le choix…

L’Apprenti ferma les yeux et invoqua Perthro, le Cornet à Dés, que les Sorciers utilisaient souvent comme guide dans le Wyrd et les chemins labyrinthiques. Il chuchota son nom. Comme il s’y attendait, le Graphème ne se manifesta pas.

– Espérons que Perthro apparaisse avant que les

Korrigans nous rattrapent, dit simplement Guillemot en s’asseyant par terre.

Tout le monde l’imita.

– Si on faisait un jeu en attendant ? proposa Coralie.

Pour toute réponse, les autres lui firent les gros yeux. Même Romaric la gronda.

– Pour une fois que j’essaie de plaisanter ! se plaignit-elle.

– En tout cas, commenta Ambre, je trouve que pour l’instant on se débrouille sacrément bien.

– C’est vrai, approuva Romaric. De vrais champions !

– D’autant que si les Korrigans avaient été honnêtes, ajouta Gontrand, on serait repartis avec un sac plein de pièces d’or !

– Oui, les amis, tout s’est fort bien déroulé, acquiesça gravement Bertram. Hélas ! J’ai, quant à moi, failli… Heureusement que la douce Agathe était là pour réparer ma prestation minable !

– Allons, Bertram ! le consola Romaric, je n’ai pas fait beaucoup mieux ! La seule qui aurait pu remporter son épreuve, c’est Ambre, si les Korrigans n’avaient pas triché.

– Quant à mon intervention… intervint Agathe, l’air penaud. J’ai honte, rien que d’y penser. Si Guillemot n’avait pas été là…

– Nous pouvons remercier Guillemot qui nous a tous tirés d’affaire ! s’exclama Gontrand.

– Je suis entièrement de ton avis ! s’enthousiasma Bertram. Je propose une ovation pour notre sauveur !

– Hum… mais pas trop fort, d’accord ? répondit Guillemot en rougissant légèrement. Il ne faudrait quand même pas que les Korrigans…

– Pour notre héros, les amis ! continua Bertram sans l’écouter. Hip hip hip… !

– Hourra ! crièrent-ils tous.

– Hip hip hip… !

– Hourra !

Guillemot leva soudain la main pour demander le silence, ferma les yeux et se concentra.

– Ça y est, annonça-t-il. Perthro se manifeste ! Pas de doute : il faut prendre le couloir du milieu.

Gontrand et Agathe, qui seraient partis l’un à droite, l’autre à gauche, se regardèrent d’un air gêné.

– Vite ! ordonna Romaric. Les Korrigans sont peut-être déjà à nos trousses.

Ils s’engagèrent aussitôt dans la galerie et avancèrent le plus rapidement possible. Ils rencontrèrent bientôt une autre bifurcation, mais, guidés par le Graphème, ils prirent tout de suite la bonne direction.

Ils parvinrent enfin au pied de l’escalier menant au dolmen. Le passage était resté ouvert ; ils grimpèrent quatre à quatre les marches de pierre.

– Ouf ! s’exclama Ambre en respirant goulûment les odeurs de la nuit. Jamais je n’aurais imaginé qu’un jour l’air libre me manquerait tant !

– Moi, ce sont les étoiles que je suis content de retrouver, avoua Guillemot en échangeant avec Bertram un regard complice.

– Désolé de jouer le rabat-joie, annonça Romaric, mais il vaudrait mieux ne pas traîner. J’entends comme des cris, sous terre…

– Tu as raison, dit Guillemot. En route !

Ils s’élancèrent sur la lande, en direction de Dashtikazar.

– Est-ce que ça court vite, un Korrigan ? s’inquiéta Coralie.

– Environ deux fois plus vite qu’un homme, la belle, répondit Bertram.

– Tu crois qu’on arrivera à Dashtikazar avant qu’ils nous rattrapent ?

– Pas si ce sont eux que Romaric a entendus tout à l’heure.

– Dépêchons-nous, alors ! s’inquiéta Agathe en se retournant d’un air inquiet.

Derrière eux, la lande bruissait de mille piétinements.

Les sept amis se mirent à courir au milieu des bruyères et des arbustes, gênés par les ombres étranges que la lune dessinait sur le sol.

– Plus vite ! Plus vite ! hurla Romaric resté en arrière pour presser les retardataires.

Coralie poussa un cri. Dans sa course, elle avait heurté Agathe et toutes deux roulèrent au sol. Romaric se précipita pour les aider à se relever.

Les autres s’arrêtèrent pour les attendre.

– Qu’est-ce qu’on fait ? demanda Bertram qui s’était approché de Guillemot.

– Je crois qu’il n’y a rien à faire ! annonça Gontrand. Les Korrigans nous rattrapent…

Au même instant, une multitude de pattes de chat s’accrochèrent aux jambes et aux bras des fuyards. En quelques secondes, les sept amis se retrouvèrent de nouveau prisonniers.

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