George Alec Effinger Privé de désert

Pour ceux qui n’auraient pas lu Gravité à la manque[1]

En ce début de XXIIe siècle, dans le quartier chaud d’une capitale du Moyen-Orient, Marîd Audran, le « Maghrebi », a bien des problèmes : détective privé de son état, il a su jusque-là naviguer habilement entre prostituées et proxénètes, trafiquants et pontes du milieu. Et s’il avoue un léger penchant pour les paradis artificiels des pilules de soléine ou de triamphés, il a toujours jalousement refusé de recourir à l’amplification bioélectronique, ces mamies (Modules d’Aptitudes Mimétiques Enfichables) et papies (Périphériques d’APprentissage Intégré Électroniques) qu’on se branche directement dans le crâne et qui permettent de changer à loisir de personnalité. Or c’est justement un tueur à gages équipé de la sorte qui va troubler la sérénité d’un Marîd plus épicurien que strict adepte du noble Qur’ân, aimant taper le carton avec ses copains Jacques, Mahmoud et Saïed, ou draguer les jeunes débs et les effeuilleuses sexchangistes qui bossent dans la boîte de sa copine Chiriga. Seulement voilà, plusieurs de ses amis se font salement rectifier. « Papa » Friedlander bey, le parrain bicentenaire qui règne sur le Boudayin, le soupçonne de l’un de ces crimes : même s’il parvient à se disculper, Marîd se voit contraint de traquer le tueur pour le compte de Papa. Et comme l’adversaire est de taille, il n’a dès lors d’autre choix que de se faire « câbler »… Ainsi va-t-il découvrir, de l’intérieur, que la formidable liberté de manœuvre offerte par l’amplification électronique n’est pas un cadeau de tout repos… Certes, Marîd réussira à neutraliser le tueur fou, mais au prix d’une violence qui va lui aliéner la plupart de ses amis, aux yeux de qui il est devenu le bouc émissaire, rappel vivant que le monde n’est pas « aimable et sain […], que la folie le parcourt en liberté, que leur propre vie, leur propre sécurité est menacée ». Qui a dit qu’au royaume d’Allah tout était sucre et miel ?

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