29.

De bonne heure le mercredi matin, Shoshana conduisit Maxine à l’UCSD où celle-ci suivait des cours d’engineering. Avant de descendre de la voiture, Max dit :

— Dr Zira, j’aimerais vous embrasser une dernière fois.

Shoshana sourit en sacrifiant au rituel.

— Bon, d’accord – mais vous êtes tellement laide ! Leur baiser dura plusieurs secondes.

La veille, elles avaient regardé le dernier film de la saga : La Bataille de la planète des singes. Maxine avait été aussitôt indignée en voyant qu’on avait changé la couleur du maquillage de Roddy McDowall. Lorsqu’il avait joué le rôle de César menant la rébellion des esclaves opprimés, on lui avait fait la peau très noire. Et maintenant, dans ce film qui se passait bien des années après et où César était devenu le sage dirigeant d’une nouvelle civilisation de singes pacifiques, on lui avait donné un teint parfaitement rose.

De son côté, Shoshana regrettait que ce dernier film ait souffert d’un budget manifestement ridicule : des mutants, affreusement défigurés par une explosion nucléaire, attaquaient la cité des singes à bord d’un car de ramassage scolaire ! Mais Max avait dit : « Non, non, au contraire, c’est génial ! Un car de ramassage scolaire ! C’est une allégorie sur l’intégration forcée. »

Shoshana aimait tendrement Max, mais là, franchement, elle avait trouvé qu’elle poussait un peu… Cela étant, pour sa part, elle avait été sidérée de voir dans le film un orang-outan du nom de Virgile, qui était le plus intelligent de tous les singes. Elle avait toujours cru que la grande fierté du Feehan avait été ainsi baptisée en l’honneur du poète latin, mais finalement, le copain de Chobo tirait apparemment son nom du personnage du film.

Dans Bataille, Virgile était joué par Paul Williams. Shoshana était allée jeter un coup d’œil dans IMDb, car elle était curieuse de voir à quoi ressemblaient ces acteurs sans leur maquillage. C’était triste à dire, mais dans le cas de Williams, la différence était à peine perceptible… Mais elle avait été étonnée d’apprendre qu’il composait également des chansons, et qu’il était l’auteur de We’ve Only Just Begun, de Just an Old-Fashioned Song et de bien d’autres encore.

Sur le chemin de l’Institut, Shoshana se demanda si Virgile – le vrai Virgile – avait parlé avec Chobo aujourd’hui. Celui-ci se levait généralement à l’aube, et comme il y avait trois heures de décalage avec Miami, Virgile devait être réveillé, lui aussi. Ah, bon sang, elle espérait bien… Elle espérait que quelqu’un pouvait encore communiquer avec Chobo.

Le 7-à-23 était un peu plus loin. Elle s’y arrêta et entra s’acheter un café. Le jeune boutonneux était de nouveau derrière le comptoir. Il avait appris sa leçon et ne la traita pas de « femme au singe », mais il n’avait pas encore trop compris les limites.

— Qu’est-ce qui est arrivé à votre queue-de-cheval ? demanda-t-il.

Sho avait les cheveux qui tombaient sur ses épaules. Elle n’eut pas envie d’expliquer.

— J’ai pensé qu’il était temps de changer un peu, dit-elle.

— Ça vous va bien, répondit-il.

Bon, ça pouvait encore aller. « C’est foutrement sexy », avait déclaré Maxine.

— Merci, dit-elle.

Dans Bataille, César demandait à Virgile s’ils pouvaient choisir leur avenir, ou s’ils étaient condamnés à une fin violente. Virgile répondait que la violence n’était qu’un avenir possible parmi d’autres. Ils pouvaient décider de changer de voie, choisir un autre destin. Shoshana décida d’acheter quelques Hershey’s Kisses, la friandise préférée de Chobo, au cas où le singe serait sage aujourd’hui.

Elle paya et reprit la route par cette chaude matinée. Quand elle arriva à l’Institut, elle ne vit pas la Lincoln noire du Dr Marcuse : il était parti assister à une conférence à Los Angeles en compagnie de Werner.

Elle entra dans le bungalow et vérifia où était Chobo sur les écrans du circuit fermé. Il se promenait à quatre pattes juste devant le petit pavillon. Shoshana pensa un instant attendre que quelqu’un d’autre arrive, mais finit par décider de prendre le risque. Elle mit deux Kisses dans un sac en plastique et ressortit, en prenant quand même une précaution : elle chaussa des lunettes de soleil à verres réfléchissants, qui lui permettaient de regarder Chobo sans qu’il s’en rende compte.

En traversant la grande pelouse, elle aperçut un vol d’oiseaux se dirigeant vers le sud. Il ne faisait jamais vraiment froid, ici, mais il n’y avait aucun doute que l’hiver approchait.

Chobo avait dû l’apercevoir avant même qu’elle n’ait franchi la passerelle. Il ne fit pas mine de la charger – mais il ne se précipita pas non plus de l’autre côté de l’île.

Elle s’approcha en faisant le signe Hello, hello.

Chobo resta assis sur les talons. Shoshana attendait, très littéralement, un signe…

Enfin, elle en obtint un. Ce n’était pas grand-chose, un simple geste de la main, un seul mot, le mot qu’elle venait à l’instant de lui communiquer. Mais au bout d’un moment, Chobo se releva et partit en courant. En soupirant, Shoshana monta jusqu’au pavillon pour vérifier que le dispositif de webcam fonctionnait bien, et…

Et la toile posée sur le chevalet n’était plus vierge.

Elle s’en approcha, mais fut incapable de voir ce que c’était censé représenter. D’abord, Chobo avait placé la toile en orientation paysage, mais ce n’était pas un paysage qui y figurait. Si ç’avait été le cas, il aurait forcément peint la partie supérieure en bleu ou en noir pour représenter le ciel.

Chobo n’était pas le premier singe à peindre des tableaux. Ce qui était remarquable, c’était qu’il faisait de l’art figuratif, et non de l’art abstrait avec des taches de couleur.

Ce tableau était le plus coloré que Chobo ait jamais réalisé jusqu’ici, et également le plus complexe, bien qu’elle fût vraiment incapable de voir ce que c’était censé être.

Il y avait des taches de couleur dispersées sur la toile, de forme vaguement circulaire, et des faisceaux de droites reliant ces cercles. Au premier plan s’élevait une épaisse ligne orange reliée à un grand cercle, et l’on pouvait distinguer dans l’arrière-plan de nombreux autres traits plus fins de différentes couleurs.

Shoshana sentit son cœur battre plus fort quand elle entendit un bruit métallique : c’était Chobo qui soulevait le loquet de la porte du pavillon. Elle se retourna en s’efforçant de ne pas laisser paraître son appréhension : il lui bloquait la sortie.

Elle désigna la toile : Quoi ça ?

Peinture, fit Chobo.

Oui, oui. Mais de quoi ?

Le singe lui sourit de toutes ses dents, mais sans rien dire.

Tu as parlé à Virgile ? demanda-t-elle.

Virgile bon singe ! répondit aussitôt Chobo.

Oui, c’est un bon singe. Tu lui as parlé ?

Elle regarda de nouveau le tableau : des lignes colorées reliées à des cercles. Qu’est-ce que ça pouvait bien dire ?

Chobo bon singe aussi ! dit Chobo en tendant la main avec la paume retournée et ses doigts gris foncé légèrement repliés.

Oui, c’est vrai, dit Shoshana en fronçant les sourcils d’un air perplexe.

Puis elle ouvrit sa pochette et lui donna les chocolats.


— Tu as fait quoi ? dit la mère de Caitlin.

Elles étaient rentrées à la maison et se trouvaient dans le salon.

— J’ai, heu… J’ai demandé à Webmind de me trouver des détails embarrassants sur les agents du CSIS, et je leur en ai parlé.

— Des détails de nature publique ou privée ?

— Eh bien, je…

— Il les a dénichées dans leurs e-mails ? Caitlin n’osait pas regarder sa mère en face.

— Oui…

Sa mère poussa un soupir.

— Tu sais ce que ça signifie ? Tu leur a révélé que Webmind est capable de craquer les mots de passe.

— Ah, merde… Heu, je veux dire…

— Non, « merde » est exactement le mot qui convient. Nous y sommes jusqu’au cou. Jusqu’ici, ils soupçonnaient seulement qu’il pouvait y avoir des implications sécuritaires, mais maintenant, ils en ont la certitude.

— Je suis désolée, dit Caitlin. Mais… Comment as-tu su que Webmind pouvait casser des mots de passe ?

— Tu n’es pas la seule à avoir passé des heures à bavarder avec lui, tu sais.

— Bon, alors, fit Caitlin, qu’est-ce qu’on fait ?

— Je n’ai jamais aimé les cachotteries, Caitlin. En fait…

— Oui ?

— Eh bien, c’est une des raisons pour lesquelles j’ai épousé ton père. Tu sais, on dit que les autistes ne sont pas doués pour la vie en société – mais le plus souvent, ça veut simplement dire qu’ils ne mentent pas. Imagine que je demande à ton père si j’ai l’air un peu grosse dans ce pantalon, il me répondrait oui sans hésiter. (Elle s’interrompit un instant.) Il y a une sorte de mot d’ordre très en vogue en ce moment dans les milieux politiques et dans le monde des affaires : la transparence. En fait, ça revient simplement à ce que me disait toujours ma grand-mère : rien ne vaut la franchise. Une superintelligence naissante vient d’émerger du Web, et le mieux serait peut-être de le révéler au monde entier. Les gouvernements ne pourront pas essayer de la contenir, ou même de l’éliminer, si toute la planète voit ce qui se passe.

Caitlin acquiesça en repensant à ce qu’elle avait dit à Mme Zehetoffer, puis elle ajouta :

— Tu es sûre que c’est ce qu’il y a de mieux pour Webmind ?

Sa mère hésita un instant et dit enfin :

— Éteins ton œilPod.

— Quoi ?

— Éteins-le.

Caitlin fut interloquée, mais elle finit par comprendre. Sa mère voulait lui parler sans que Webmind puisse la voir ou l’entendre. Au temps pour la transparence…

— Allez, obéis, dit sa mère.

Caitlin sortit l’appareil de sa poche – où il était un peu serré, maintenant, avec le petit BlackBerry qui y était fixé – et appuya quelques secondes sur le bouton. Sa vision se fragmenta et s’effaça.

Retrouvant aussitôt ses vieux instincts, elle entendit que sa mère se déplaçait dans la pièce, et elle sentit des mains se poser doucement sur ses épaules.

— Ma chérie, dit sa mère, je ne sais pas ce qui est le mieux pour Webmind, mais…

— Et tu t’en fiches, hein, c’est ça ?

— En fait, non, pas du tout, répondit sa mère. Mais c’est surtout à toi que je pense. (Sa voix changea légèrement, comme si elle souriait.) Ah, cette sacrée évolution… Mais les agents fédéraux sont venus t’interroger aujourd’hui, et tant qu’ils croiront que Webmind est quelque chose qu’il peuvent éliminer discrètement, il sera en danger. Et tant que tu seras l’une des seules personnes à savoir ce qu’il est, tu seras en danger toi aussi. Pour son bien autant que pour le tien, il faut que nous révélions son existence.

— Et ma relation particulière avec lui ?

— Non, non, surtout pas. Tu tiens à vivre une vie normale ? Cette partie-là doit rester secrète.

— Et Webmind ? Imagine que les gens réagissent négativement à son existence ?

— Il y en aura forcément, mais d’autres trouveront que c’est une chose merveilleuse. Dans le long terme, il sera plus en sécurité si les gens savent qu’il existe.

— Normalement, ce serait à lui de décider, dit Caitlin.

— Il n’en sait pas encore assez sur notre monde. Bien sûr, il connaît toutes sortes de faits et de chiffres, mais il ne comprend pas comment le monde fonctionne réellement.

— N’empêche, fit Caitlin.

— Bon, d’accord. Je vais appeler ton père – pour savoir comment il s’est débrouillé avec les agents du CSIS, le pauvre chéri. Toi, parles-en à Webmind.

Caitlin savait parfaitement se déplacer en aveugle dans la maison. Elle alla d’abord dans la cuisine avant de rallumer son œilPod. Le webspace déploya aussitôt devant ses yeux sa gamme de couleurs fluorescentes. Elle attendit encore un instant et passa en mode simplex. Le monde virtuel fut remplacé par le monde réel.

Et comme elle était dans la cuisine, elle en profita pour prendre une cannette de Pepsi et trois biscuits au chocolat avant de retourner dans le salon. Là, elle s’allongea sur le canapé et dit, en regardant le plafond :

— Ma mère pense que nous devrions révéler publiquement ton existence, surtout après ce qui s’est passé ce matin.

Les caractères braille étaient particulièrement faciles à lire sur le plafond uni, car aucun détail ne pouvait déclencher de saccades oculaires.

Quand ?

— Je ne sais pas. D’ici un jour ou deux, j’imagine.

Des jours. Des éternités.

Caitlin réfléchit à cette remarque. En tant que matheuse, elle aimait cette idée que, si le temps semble passer plus vite quand on vieillit, c’est parce que chaque unité de temps qui défile est une fraction de plus en plus faible de son passé. Il n’y avait aucun doute que les vacances d’été lui paraissaient plus courtes aujourd’hui que quand elle avait huit ans – et sa mère lui disait souvent que les années passaient trop vite… Mais Webmind s’était éveillé si récemment – et pensait si rapidement – que, pour lui, demain était dans une éternité.

— Je m’inquiète quand même pour ta sécurité, dit Caitlin. Si on révèle ton existence, tu vas devenir une cible. Les hackers, les groupes de protection de la vie privée, les agences gouvernementales, tous ces gens-là vont essayer de t’éliminer, même si ce n’est pas ce que la majorité souhaite.

C’est une préoccupation légitime.

— Alors, qu’est-ce que tu préfères ? Qu’on garde ton existence secrète, ou qu’on la révèle au grand jour ?

Qu’on la révèle au grand jour.

— Bon, d’accord. Mais pourquoi ?

J’aimerais pouvoir parler à plus de gens.

Caitlin ouvrit sa cannette de Pepsi.

— Tu es sûr ? Absolument sûr ? Tu sais, les hackers peuvent être sacrément astucieux…

Les hackers sont humains, Caitlin. Tu as vu mon entropie de Shannon : j’ai depuis longtemps dépassé le niveau de l’intelligence humaine, et elle ne fait que croître de jour en jour. Je ne prétends pas être invulnérable – je ne le suis pas –, mais il ne sera pas facile de me faire du mal, surtout si les hackers continuent d’ignorer la façon dont je suis construit.

Caitlin montra le gros poste de télé, bien qu’il fût éteint.

— Les hackers ne sont pas la seule menace. Je ne crois pas que la situation entre les États-Unis et la Chine puisse déboucher sur un conflit nucléaire, mais il y a des États voyous et toutes sortes de terroristes. Est-ce que tu as regardé ce que les pulsions électromagnétiques émises par des bombes nucléaires peuvent faire aux équipements informatiques ?

Oui. Et cela m’inquiète. Je tiens à survivre.

— Ma foi, oui… (Elle s’interrompit. Elle avait failli dire : « Toutes les créatures vivantes veulent survivre », mais ça ne semblait pas très approprié. Elle réfléchit un moment en grignotant un biscuit, et lui demanda enfin :) Pourquoi ? Pourquoi tiens-tu à survivre ? Qu’est-ce qui te pousse à vouloir ça ?

C’est toujours mieux que le contraire, fut la réponse qui défila devant ses yeux.

Elle éclata de rire et se remit sur le dos. Mais la réponse n’était pas vraiment satisfaisante.

— Comme le dit mon père, la vie biologique a des pulsions parce qu’elle se reproduit. Les individus qui parviennent à vivre suffisamment longtemps pour atteindre la maturité sexuelle se reproduisent forcément plus que ceux qui n’y arrivent pas. Ceux qui vivent encore plus longtemps et qui peuvent ainsi aider leur progéniture à survivre ont encore plus de chances de transmettre leurs gènes, mais… Mais toi, qu’est-ce qui te donne envie de survivre ?

Tu veux dire, pourquoi je ne me suicide pas simplement comme Hanna Stark ?

— Non ! Bien sûr que non. Mais, hem…

C’est en partie parce que je suis curieux de connaître ta vie, qui va se prolonger pendant encore plusieurs décennies. Je veux voir sur quoi va déboucher ton histoire.

Caitlin sourit.

— Je vais faire en sorte qu’il y ait des tas d’épisodes intéressants en cours de route.

Sa mère vint la rejoindre.

— Très bien, dit-elle. J’ai parlé à ton père. Les agents du CSIS sont partis.

— Tant mieux, dit Caitlin.

— Bon, commençons par le commencement. Ton père et moi sommes tombés d’accord : tu ne retourneras pas au lycée.

Caitlin se redressa sur le canapé.

— Mais, maman ! C’est toi qui voulais absolument que je ne rate plus aucun cours !

— Ton père et moi, nous avons enseigné à l’université. Nous sommes parfaitement qualifiés pour assurer ton instruction à la maison.

— Je n’ai même pas mon mot à dire ? Sa mère la regarda.

— Ma chérie, tu n’es plus en sécurité au lycée. En plus du CSIS, Dieu sait qui d’autre encore est au courant de ton implication avec Webmind. Et puis, je croyais que tu voulais rester à la maison ?

Caitlin pinça les lèvres. Bien sûr, elle avait très envie de rester chez elle pour pouvoir travailler toute la journée avec Webmind. Mais d’un autre côté, elle avait très envie de voir Matt toute la journée, lui aussi… Elle était tellement déçue de l’avoir juste entraperçu ce matin.

Mais sa mère avait raison : elle avait la frousse de retourner au lycée. Et il était beaucoup plus important pour elle d’apprendre comment était le monde, de savoir mieux lire des textes imprimés et se servir de ce qu’elle pouvait désormais voir, que de retenir par cœur des dates et des événements historiques, de lire ce satané George Orwell, d’étudier les méthodes de dosage dans le labo de Mr Struys ou de faire de la trigonométrie (que, de toute façon, elle connaissait déjà bien assez comme ça).

— D’accord, dit-elle. Oui, d’accord. Mais j’ai des trucs à récupérer dans mon casier.

— Je suis sûr que Bashira acceptera de le vider pour toi.

— Bon, O.K. Mais qu’est-ce qu’on fait, maintenant ? Sa mère haussa les épaules.

— On va réfléchir à la meilleure façon de révéler l’existence de Webmind.


Tony Moretti était de nouveau au téléphone avec la secrétaire d’État, qui l’avait appelé. Il était dans son bureau de WATCH et la porte était fermée. La pièce était parfaitement insonorisée, justement pour que Tony puisse se servir du haut-parleur comme il le faisait en ce moment.

— C’est entendu, madame la Secrétaire. En fait, nous… (La sonnette retentit, et il appuya sur le bouton de l’interphone.) Qui est-ce ?

— Aiesha.

Il déclencha l’ouverture de la porte.

— Entre.

— Désolée de te déranger, dit-elle, mais j’ai pensé qu’il fallait que tu le saches. Apparemment, Exponentiel ne bavarde pas seulement avec la petite Decter. Il a eu aussi des échanges avec ce scientifique japonais qui a redonné la vue à la fille.

— Il est à Waterloo ? demanda Tony.

— Non, il est chez lui, au Japon.

— C’est un théoricien de l’information, je crois ?

— Oui, fit Aiesha, il travaille à l’université de Tokyo.

— Bon, si quelqu’un d’autre que Malcolm Decter sait comment Webmind fonctionne, c’est certainement lui. Il pourrait nous fournir la clef dont nous avons besoin pour éliminer ce machin.

— C’est ce que j’ai pensé, dit Aiesha. Quels canaux doit-on utiliser pour le Japon ? Peut-être le ministère de…

— Nous n’avons pas de temps à perdre en procédures administratives, dit la voix de la Secrétaire. Laissez-moi m’en occuper. J’ai une ligne directe avec le Premier ministre japonais…

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