— J’ai vraiment eu aucune difficulté à vous suivre, expliqua Glurk. Je veux dire, vingt personnes, ça laisse des traces, pas de problème. La moitié du temps, je devais faire attention à pas venir buter contre vous. Et puis, je me suis dit… Ils se dirigent vers le sud en ligne droite, alors autant que je passe devant, pour reconnaître le territoire et voir ce qui se passe. Une seule personne progresse plus vite qu’une vingtaine, alors pourquoi pas ? En plus, j’avais une snargue comme monture. Elles réagissent bien quand on leur témoigne un peu de gentillesse. Remarquez, faut aussi se montrer pas mal cruel. Et voilà comment j’ai rencontré Culaïna. Elle est vraiment très bizarre.
Il y eut un silence. Puis Forficule annonça :
— Je crois qu’on n’a pas tout compris à ton histoire.
— Vous allez voir où elle habite, reprit Glurk. Je… euh… Je crois pas que les gens puissent voir où c’est, à moins qu’elle le souhaite. En tout cas, moi, j’ai jamais rien vu de pareil. Voilà, elle se tenait là, et… et… Elle m’a dit où vous vous rendiez, comment je pouvais m’agripper au fond de cette plate-forme de levage, faucher l’armure d’un Vortegorne et libérer les pones, comment elles savaient voler… tout, quoi.
— Mais comment savait-elle tout ça ? demanda Brocando.
— Parce qu’on va aller le lui raconter, expliqua Glurk. Me demande pas de t’expliquer comment ça fonctionne.
— Leurs souvenirs englobent le futur en même temps que le passé, dit Fléau.
— Mais ils n’ont pas le droit de raconter ! s’exclama Forficule. Sinon, il pourrait se passer des choses terribles !
— Ça, j’en sais trop rien, répondit Glurk, prudent. Moi, je vois les choses comme ça : on vous a libérés… Ça a pas l’air si terrible que ça.
— Mais il faut rejoindre la tribu, dit Forficule.
— Et mon peuple ! renchérit Brocando. Ils ont besoin de nous !
— J’ai réfléchi à ça, dit Glurk. Il y a deux cents Munrungues et trois mille Fulgurognes, tous armés et groupés et… Vous croyez qu’ils ont besoin de nous ? Y a de bons petits gars, dans la tribu. Et Snibril se trouve avec eux… Non ?
— Ben… dit Brocando. Oui. On l’espère.
— Alors, tout va bien. Et tes gens savent se battre. On est quatre dans une région qu’on connaît pas, bourrée d’ennemis… Je crois bien que c’est nous qui avons besoin d’eux. Enfin, bref, faut qu’on aille voir Culaïna.
— Mais elle t’a prévenu, et tout a marché comme prévu, rétorqua Brocando. On pourra la remercier une autre fois…
— Non, objecta Forficule. Si Glurk dit vrai et qu’elle lui a révélé une partie de l’avenir dont elle se souvenait et que nous n’y allions pas… Alors, j’ignore ce qui pourrait se passer. Tout l’univers du Tapis pourrait se retrouver en pelote, je ne sais pas. Ça pourrait être la pire catastrophe qui se soit jamais produite.
— Pire que quoi ? demanda Brocando.
— Pire que tout ce que vous pourriez imaginer, répondit Glurk.
Tout le monde médita un moment.
— Elle doit t’accorder une grande confiance, finit par dire Fléau.
Pendant le reste de la journée, les pones continuèrent leur route. Le quatuor sommeillait sur le dos d’Acrelangue, ou contemplait en silence les ombres qui s’allongeaient. Mais la plupart du temps, chacun était préoccupé par ses soucis.
Sous leurs pas se déployait une poussière abondamment boisée dans laquelle de petites créatures invisibles bourdonnaient et bruissaient. Sur la peluche vert tendre qui pendait en riches tentures au-dessus d’eux, poussaient des fleurs, des fleurs de peluche, plus grandes qu’un homme, aux pétales luisant de mille nuances de vert, de l’olive profond jusqu’au jaune acide, et répandant des effluves qui emplissaient les clairières de leurs relents verts.
— Voilà quelque chose de très intéressant, commenta Forficule en se redressant sur la selle.
C’était la première parole prononcée depuis près d’une heure.
Il s’arrêta et fixa l’autre extrémité de la clairière. Toutes les pones tournèrent la tête dans cette direction.
— C’est quelque chose qu’on ne voit pas tous les jours, ajouta-t-il.
Les autres suivirent la direction qu’il indiquait du doigt. Dans la verdure, de l’autre côté de la clairière, un sanglier les contemplait avec une expression solennelle. Quand ils se retournèrent vers lui, il battit prestement en retraite, et ils l’entendirent s’éloigner entre les poils.
— Je ne vois rien de tellement spécial, grommela Fléau.
— Il était brun, voilà tout, dit Forficule. Il aurait dû être vert. Presque toutes les bêtes sauvages du Tapis adoptent la couleur de leur milieu de naissance. Un mimétisme protecteur.
— Il s’est peut-être égaré par ici, suggéra Fléau.
— Non, répondit Glurk avec un sourire. On l’a attiré. Nous sommes presque arrivés. Ça va vous laisser baba, j’vous le garantis.
Les pones se détournèrent et se frayèrent un chemin le long d’une nouvelle piste. Tandis que les énormes créatures s’ouvraient une route dans les épaisses frondaisons, des dizaines de bestioles s’égaillaient précipitamment. Elles exhibaient toutes les couleurs du Tapis.
C’est alors que les pones émergèrent à l’air libre…
Les poils poussaient étroitement serrés à la périphérie d’une vaste clairière, et réfléchissaient la clarté de ce qui en occupait le centre.
C’était un cristal de sucre brut. Aussi haut que le grand palais de Périlleuse, plus blanc que de l’os, le cristal brillait de reflets froids dans la pénombre verte. Il captait toute la lumière qui tombait entre la poussière tassée, et au sein de sa prodigieuse masse cubique dansait une lueur blanche. Par endroits, il luisait comme du vernis poli, renvoyant le reflet des créatures qui se pressaient autour de lui.
On voyait des moutons de poussière et des taraudeurs de trame de toutes les couleurs, des sangliers par hardes entières, des sorathes à long cou, des trumpes placides et dodus, des pipe-gromes, des chèvres prestes aux cornes torsadées, et des créatures que même Forficule ne savait pas nommer : une bestiole bardée d’écailles, à l’échine hérissée de piquants, et une longue créature qui semblait toute en pattes. Le bruit de mille langues occupées à lécher emplissait la clairière.
Acrelangue et son troupeau avancèrent pesamment, faisant presque choir Glurk et les autres de leur selle. Les créatures plus menues s’écartèrent en toute hâte pour leur céder la place.
— C’est… superbe, murmura enfin Brocando.
Fléau resta tête levée, bouche bée. Même Forficule était impressionné.
Ils descendirent du dos de la pone et s’avancèrent d’un pas prudent vers la surface polie. Les animaux qui léchaient le sucre firent à peine attention à eux.
Glurk en détacha un morceau avec son couteau, et resta un instant immobile à le mâchonner.
— Tiens, goûte, dit-il en jetant un morceau à Fléau.
Celui-ci obtempéra avec précaution.
— Du sucre, conclut-il. Je n’en avais goûté qu’une seule fois. Il existait un cristal près des contrées de l’Atre. L’Empereur s’en faisait livrer par petites quantités.
— Ça ressemble au miel, mais c’est différent, jugea Brocando. D’où est-ce que ça vient ?
— Du même endroit que le sable, le sel ou la cendre. D’en haut, répondit Forficule. On n’en sait pas davantage.
Instinctivement, ils contemplèrent le panache de poils au-dessus de leurs têtes. La voix de Brocando rompit le silence :
— Bon, en tout cas, voilà notre repas de midi. A votre convenance – fricassée de trumpe ou rôti de grome. Pas étonnant qu’ils soient de toutes les couleurs. Le cristal doit les attirer de partout. Cela dit, ça ne semble pas très régulier de les tuer pendant qu’ils ne regardent pas.
— Alors, rangez votre couteau, fit une nouvelle voix.
Forficule s’étrangla sur son morceau de sucre.
Une silhouette se tenait un peu à l’écart. Elle était de haute taille, avait le visage émacié d’un Vivant, que la clarté du cristal rendait spectral. Elle portait une masse de cheveux blancs – on distinguait mal où se terminait la chevelure et où commençaient les robes longues et informes. Et elle était jeune mais son déplacement la faisait paraître tantôt vieille, tantôt mûre. Le temps passait sur son visage comme un jeu d’ombres.
Une de ses mains retenait par le collier une snargue qui battait de la queue d’un air menaçant.
— Hem, glissa Glurk. Voici Culaïna.
La Vivante dépassa le groupe pour aller flatter le flanc d’Acrelangue. Le long col de la pone se tourna et ses petits yeux se posèrent sur Culaïna ; puis l’animal mit les genoux en terre et posa sa tête sur le sol.
Culaïna se tourna en souriant. Toute la clairière sembla sourire en même temps. Le changement fut soudain et spectaculaire.
— Ainsi donc, vous voici, dit-elle. Il faut que vous me racontiez vos aventures. Je sais que vous allez le faire. Vous l’avez fait, je m’en souviens. Suivez-moi. Il y aura de quoi manger.
De l’autre côté de la clairière se trouvait la demeure de Culaïna, ou l’une de ses demeures. C’était un simple toit en peluche tressée, posé sur des piquets. Il n’y avait ni parois ni portes, aucun fossé ni palissade pour la protéger la nuit, aucun site dévolu à un âtre. Au-dessus, une grosse ruche d’hymétores. Autour du campement de Culaïna, des animaux paissaient et somnolaient en paix.
Quand Culaïna s’approcha en compagnie des autres, les hymétores se mirent à bourdonner avec fureur et elles prirent leur essor au-dessus de la ruche, en un essaim furieux. Le quatuor plongea à terre en tentant de se couvrir le visage de leurs bras, jusqu’à ce que Culaïna lance un seul coup de sifflet.
Les créatures passèrent au-dessus d’eux sans attaquer et regagnèrent pacifiquement leur nid perché dans les poils. Glurk entr’aperçut de longs dards acérés.
— Elle les a renvoyés, chuchota Brocando, pressant. Un seul coup de sifflet et ils lui ont obéi !
Sur le sol, sous l’abri, reposaient un amas de fruits et quelques jattes emplies d’un liquide vert.
— J’en ai déjà bu, expliqua Glurk. C’est de la sève de poil vert. Ça requinque bien.
Ils s’assirent. Forficule se tortilla, mal à l’aise, et Culaïna lui sourit.
— Exprimez ce qui vous est venu à l’esprit, lui conseilla-t-elle. Je me souviens que vous l’avez fait. Mais il faut que vous le disiez.
— Les Vivants n’ont pas le droit de révéler le futur aux gens ! s’exclama Forficule. Tout le monde sait ça ! Ils n’en parlent jamais ! Il y a trop de danger à révéler aux gens ce qui doit arriver ! Tout cela est très…
— Je me souviens de vous avoir interrompu ici, répondit la Vivante. Oui. Je connais les règles. Et c’est leur nature, rien de plus. De simples règles. Forficule, je ne suis pas comme les autres Vivants. As-tu déjà entendu le mot… thunorgue ? Je sais que oui.
— Oui, oui, les Vivants qui se souviennent des choses qui… Oh, ma parole ! s’exclama Forficule, bouleversé. Je croyais que ce n’était qu’une légende. Que les thunorgues étaient des monstres.
— Ce n’est qu’une légende, c’est vrai. Mais ça ne signifie pas qu’elle ne reflète pas la vérité. Les règles ne s’appliquent pas à ma personne. Ce ne sont que des règles. On n’est pas contraint de les respecter… Pas forcément. Je n’aime guère les villes. Mais cet écrasement, cette destruction du Tapis… Ce bronze que l’on forge, la poussière que l’on piétine…
Elle secoua la tête.
— Non. Cela ne sera pas. Tu partiras pour Uzure demain, avant que les moizes n’aient quitté Périlleuse. Il y aura une bataille. Il faut que vous soyez vainqueurs. Je ne vous dirai pas de quelle manière. Mais il faut que vous soyez vainqueurs. En attendant, vous pouvez passer la nuit ici. Ne craignez rien. Il ne vient en ma demeure que ce que j’y attends.
— Non, dit Fléau. Il faut que je sache. Pourquoi nous aidez-vous ? Les Vivants se souviennent de tout ce qui est arrivé et de ce qui arrivera. Et ils n’en parlent pas. En quoi êtes-vous différente ?
Culaïna inclina la tête sur un côté.
— Vous avez entendu ce que j’ai dit ? demanda Fléau.
— Oui. Je me remémorais ce que je vous ai répondu. Ah, oui. Voilà, ça me revient. Il y a tant de choses, voyez-vous… Tant de choses…
Elle se leva et s’éloigna un peu du groupe. Puis elle se tourna de nouveau vers eux.
— Parfois… Mais c’est rare, aussi rare que ma snargue blanche que vous voyez ici… Parfois naît un Vivant qui est différent, aussi différent des autres Vivants qu’eux-mêmes le sont de vous. Voyez-vous, nous nous souvenons… de tout.
— Comme tous les Vivants, dit Fléau.
— Non, corrigea Culaïna. Eux ne se souviennent que des événements qui arrivent. Nous, nous nous souvenons de ce qui pourrait se produire. Je me rappelle ce qui se passera si vous ne triomphez pas. Je connais toutes les possibilités. Pour tout ce qui se réalise, un million de choses n’accéderont pas à l’existence. Je les vis toutes. Je me souviens de votre victoire et je me souviens de votre défaite. Je me souviens du triomphe des moizes. Je me souviens du vôtre. Les deux éventualités coexistent, pour moi. Pour moi, elles se sont toutes deux réalisées. Mes frères et sœurs Vivants se remémorent le fil de l’histoire. Mais je me remémore tous ceux qui n’ont jamais été tissés. Pour moi, toutes ces possibilités sont réelles. Je vis en toutes.
— Mais pourquoi ? demanda Fléau.
— Il faut que quelqu’un s’en charge. Sinon, elles n’auraient jamais pu exister.
Elle s’avança d’un pas dans l’ombre.
Ils l’entendirent parler. Sa voix semblait provenir d’un endroit lointain.
— Aucun événement n’est inévitable. On ne vit pas l’Histoire. On la forge. Une seule décision. Un seul individu. Au moment adéquat. Rien n’est trop petit pour changer les choses. On peut tout transformer.
La voix s’évanouit. Au bout d’un moment, Fléau se remit sur pied, se sentant extrêmement balourd, et il inspecta les ombres.
— Elle a disparu.
— Je me demande si elle peut jamais exister complètement en un seul lieu, dit Forficule. Et maintenant, que fait-on ?
— Je vais piquer un roupillon, répliqua Glurk. Vous, je ne sais pas, mais pour moi, la journée a été dure.
Fléau se réveilla plusieurs fois en croyant percevoir dans le vent un fracas et des cris. Mais quand il tendait l’oreille, tout semblait s’évanouir.
Forficule rêva. Il vit des poils se tordre et plier comme sous l’emprise d’une bourrasque, les feux de dix mille prunelles vertes, rouges et blanches et, ses cheveux volant en désordre dans le vent, la silhouette de Culaïna qui avançait dans le tumulte de la nuit, vivant tout ce qui existait, tout ce qui pouvait exister, tout ce qui existerait.
Glurk rêva de corps souples se frayant un passage rapide dans les fourrés. Sur leur passage, le Tapis semblait s’animer. C’était comme un choc dans une tasse ; les ondes concentriques s’étendaient, prenant de l’ampleur au fil de leur progression. Dans les profondeurs des cavernes souterraines, des créatures endormies s’éveillèrent pour pousser des hurlements. Il vit le Déàcoudre qui s’étendait très loin au-delà de la Vernisie, un grand dôme d’argent. Il vit les feux des Vivants occupés à extraire le vernis de Vernisie, les flammes que vomissait leur forge.
Dans son rêve, il se déplaçait entre les poils comme un spectre dans la nuit, jusqu’à ce qu’il atteigne la Plaine Perpétuelle. Le Tapis se terminait abruptement et, au-delà de ses frontières, la Plaine s’étendait à perte de vue. Il chercha des poils et n’en vit aucun, rien qu’une plaine sans fin, et les boules de poussière que faisait rouler le vent mélancolique. Culaïna était debout au pied de l’ultime poil, sa robe claquant au souffle des rafales.
Glurk se redressa brusquement.
Le matin était venu. Une lumière jaune mouchetait la clairière, faisant luire les poils comme du bronze. Brocando dormait encore. Les autres causaient paisiblement.
Un seul regard suffit.
— Pas exactement des rêves, expliqua Forficule. Nous n’avons pas réellement rêvé. Elle vit toutes ses existences à la fois, et nous en avons capté les échos…
— J’ai vu Culaïna voyager à travers le Tapis, commença Glurk. Et je crois que j’ai vu Snibril, aussi.
— Moi, j’ai vu les contrées de l’Atre et le feu céleste, ajouta Forficule.
— Y avait toutes sortes de créatures, fit Glurk.
Brocando se retourna et ouvrit les yeux. Il écouta les autres un moment, avant d’opiner.
— J’étais de retour sur la Terre de la Grand-Porte. Il y avait une caverne avec un plafond en dôme. Au-dessous du dôme, se dressait un trône de bronze, où siégeait un Vortegorne. Il avait la barbe jaune et une couronne. Deux moizes se tenaient devant lui. Je jurerais que Gormaliche était l’un des deux. Ils riaient. Et soudain, l’un d’eux s’est emparé de la couronne et le Vortegorne est resté passif, le menton sur le poing, sans dire un mot.
— Ce doit être Stagbat, leur roi, supputa Glurk. J’ai surpris une conversation entre gardes. Les moizes sont apparus un jour, après que le grand Découdre eut frappé dans les parages, et ils ont dépeint le grand Découdre comme une arme dumiie. Ils se sont présentés en alliés. Et maintenant, bien sûr, ils ont la conduite de l’endroit.
— On ne peut pas contrôler le grand Découdre, intervint Forficule. Je me tue à vous répéter que c’est un phénomène naturel.
— Ils repèrent toujours nos points faibles, dit Glurk.
Il tourna le regard vers Fléau, qui gardait le silence.
— Et toi, quel rêve as-tu fait ? demanda-t-il.
— J’ai rêvé… J’ai rêvé… (Tout d’un coup, Fléau sembla sortir d’une léthargie.) Je n’ai rien rêvé du tout. J’ai dormi comme un loir.
Il n’y avait aucun signe de Culaïna. Les pones étaient toujours là.
— Elles estiment que la vie va être intéressante, constata Glurk. Elles aimaient bien travailler pour les Vortegornes. Les gens venaient leur lire des histoires, des trucs comme ça. Ça doit pas être marrant d’avoir un cerveau et pas de mains pour faire les choses.
— Il vaut mieux aller à Uzure, annonça Fléau. Je ne crois pas que nous ayons le choix.
— Nous avons tous les choix que nous voulons, corrigea Forficule. Simplement, nous devons choisir d’aller à Uzure.
Glurk sella Acrelangue.
— On se dirige droit sur des périodes intéressantes, fit-il remarquer sur un ton sinistre.
Fléau jeta un dernier coup d’œil circulaire sur la clairière du sucre.
— Elle est par là, quelque part, dit-il.
— Partout, répondit Forficule. Partout où il y a un choix à faire.
Il y avait une expression lointaine dans les yeux de Fléau.
— Quelle sensation cela fait-il de savoir tout ce qui peut se produire ?
— C’est terrible, dit Forficule. Allons, venez. Fléau ? J’ai dit : venez !