12.

43 apr. J.C.

La grève s’étendait jusqu’à l’horizon, à droite comme à gauche, bordée d’un côté par la mer et de l’autre par des dunes où les oyats dissimulaient des terres embrumées. La bande de sable noir marquant le lais de mer était parsemée d’algues, de coquillages, d’arêtes de poissons et d’ossements d’oiseaux. Quelques goélands chevauchaient le vent. Celui-ci émettait un sifflement glacial. Il portait la saveur du sel et le parfum des profondeurs. Les vagues se brisaient mollement sur le rivage, se retiraient en sifflant, revenaient grignoter un peu plus le sable. Au large, elles dessinaient des creux impressionnants, écume blanche couronnant des vasques gris acier, s’agitant à perte de vue vers un horizon qui se confondait avec le ciel. Il semblait peser sur le monde, ce ciel, aussi terne que la mer. Des nuages effilochés voguaient sous sa chape. À l’ouest avançait la pluie.

Dans l’intérieur des terres, on voyait ondoyer les laîches autour d’étangs dont les eaux vertes apportaient au paysage son unique touche de couleur. Les forêts n’étaient que des masses sombres dans le lointain. Un cours d’eau reliait les marais à la mer. Sans doute les habitants du lieu y amarraient-ils leurs bateaux. Le hameau se trouvait à un mille des côtes, composé de cabanes aux murs de torchis et aux toits de terre et d’herbe. La fumée montant des lucarnes constituait le seul signe de vie.

Le navire mettait un peu d’animation dans cette scène. C’était un bâtiment splendide, long et racé, bordé à clins, avec un étambot et une étrave également incurvés, dépourvu de mât mais propulsé par trente rameurs. Bien que sa peinture rouge ait souffert des intempéries, sa coque de chêne demeurait robuste. Guidés par le chant du timonier, les marins le firent accoster, puis descendirent sur la grève pour l’y échouer à moitié.

Everard s’approcha. Les hommes l’attendirent, sur leurs gardes. Durant leur approche, ils avaient pu constater qu’il était seul. Une fois devant eux, il planta la hampe de sa pique dans le sol. « Salut ! fit-il.

— Viens-tu de ces maisons ? » lui demanda un homme grisonnant et balafré, sans doute le capitaine. Son dialecte lui aurait été incompréhensible si les deux Patrouilleurs ne l’avaient pas assimilé au préalable par électro-inculcation. (En fait, ils avaient dû se rabattre sur un parler danois postérieur de quatre siècles. Fort heureusement, les anciennes langues nordiques n’évoluaient que lentement. Mais ils ne pouvaient guère passer pour des natifs de cette contrée, ni de celle dont provenaient les marins.)

« Non, je suis un voyageur. Je me rendais dans ce village, espérant y trouver un abri pour la nuit, mais je vous ai vus arriver et j’ai décidé de commencer par entendre votre récit. Il est sûrement plus passionnant que celui de ces gens. Je me nomme Maring. »

Normalement, il se serait présenté comme Everard, qui sonnait comme un patronyme originaire d’un autre patois. Mais c’était sous ce nom qu’il avait rencontré Heidhin en aval, et il espérait bien le revoir ce jour. Il n’était pas question de déclencher un paradoxe – dont les conséquences seraient imprévisibles. Floris lui avait suggéré cette identité d’emprunt, qui fleurait bon la Germanie du Sud. Elle l’avait en outre aidé à s’affubler d’une perruque blonde, d’une fausse barbe et d’un nez si proéminent que le reste de ses traits passerait inaperçu. Ajoutez à cela l’oubli qui accompagne le passage des ans, et l’affaire serait entendue.

Un large sourire plissa le visage du marin. « Et moi, je me nomme Vagnio, fils de Thuthevar, et je viens du village de Hariu, dans la terre des Alvarings. Et toi, d’où viens-tu ?

— De très loin. » D’un mouvement du pouce, le Patrouilleur désigna le village. « Ils ne semblent pas vouloir sortir de chez eux, hein ? Est-ce qu’ils ont peur de vous ? »

Vagnio haussa les épaules. « Pour ce qu’ils en savent, nous sommes peut-être des pillards. Ce lieu n’est pas un port d’attache. Nous avons décidé d’accoster ici, c’est tout…»

Everard le savait déjà. En survolant la région en scooter temporel, Floris et lui avaient repéré leur navire, le seul à bord duquel ils aient aperçu un passager de sexe féminin. Un petit saut dans l’avenir, et ils avaient localisé sa prochaine étape ; un nouveau petit saut en amont, et il y avait débarqué. Floris suivrait les événements depuis les hauteurs. Il serait beaucoup trop compliqué d’expliquer sa présence.

«… et nous comptons camper sur la plage cette nuit, poursuivit Vagnio, puis faire le plein d’eau douce demain matin. Ensuite, nous voguerons jusque chez les Angles, car nous avons dans nos cales des produits que nous allons vendre à leur grand marché annuel. Si ces villageois le souhaitent, ils peuvent venir nous voir, mais de toute façon nous les laisserons en paix. Ils ne possèdent rien qui vaille la peine d’être volé.

— Même pas eux-mêmes, pour le marché aux esclaves ? » Poser ce genre de question lui répugnait, mais elle était toute naturelle à cette époque.

« Non, ils s’égailleraient en nous voyant approcher, et ils ne manqueraient pas non plus de disperser leurs rares bestiaux. C’est pour cela qu’ils ont bâti leurs masures si loin de la côte. » Vagnio plissa les yeux. « Pour ignorer ce genre de détail, tu n’es sûrement pas un gars du pays.

— Non, je suis un Marcoman. » Le territoire de cette tribu s’étendait sur ce qui serait un jour la République tchèque. « Et vous venez de… euh… de Scanie ?

— Non. Les Alvarings possèdent la moitié d’une grande île au large du Gôtaland. Accepte notre hospitalité pour la nuit, Maring, et nous échangerons nos histoires afin de… Que regardes-tu ainsi ? »

Les marins s’étaient massés autour d’eux, curieux de découvrir l’étranger. C’étaient en majorité des colosses blonds, qui empêchaient le Patrouilleur d’apercevoir le navire. Deux d’entre eux s’étaient écartés, lui dégageant la vue. Un jeune homme élancé venait de sauter sur la plage. Il leva les bras vers la proue afin d’aider une jeune femme à le suivre. Veleda.

Impossible de s’y méprendre. Même dans les profondeurs océanes de sa déesse, je reconnaîtrais son visage et ses yeux. Comme elle était jeune ! Souple comme une liane, à peine sortie de l’adolescence. Le vent jouait avec ses cheveux châtains et faisait claquer sa robe sur ses chevilles. En dépit des quinze mètres qui les séparaient, Everard crut discerner… quoi donc ? Des yeux assoiffés d’absolu, des lèvres promptes à trembler et à murmurer, un rêve, un chagrin, un deuil ?… Il n’aurait su le dire.

Contrairement à ce qu’il aurait cru, elle ne lui accorda pas le moindre intérêt. Il douta même qu’elle lui ait fait l’aumône d’un regard. Son visage pâle se détourna. Elle échangea quelques mots avec son compagnon aux cheveux noirs. Puis tous deux s’éloignèrent sur la grève.

« Ah ! elle, dit Vagnio, soudain troublé. Ils font une étrange paire, ces deux-là.

— Qui sont-ils ? » Cette question aussi était parfaitement légitime, car il était rare qu’un navire prenne une femme à son bord, si ce n’était pas une captive. Certes, les envahisseurs jutes et frisons finiraient par emmener leurs familles en Grande-Bretagne, mais cela ne se produirait pas avant plusieurs siècles.

Peut-être que les femmes Scandinaves prenaient parfois la mer dès cette époque. Mais rien de ce qu’il s’était inculqué ne permettait d’en être sûr. Ces terres et ces années étaient fort peu étudiées. On avait conclu qu’elles n’influeraient guère sur l’évolution du monde avant l’ère de la Volkerwanderung. Surprise !

« Edh, fille de Hlavagast, et Heidhin, fils de Viduhada », répondit Vagnio. Everard remarqua qu’il avait commencé par nommer la jeune femme. « Ils ont acheté leur passage, mais ce n’était pas pour commercer avec nous. En fait, elle ne souhaite pas se rendre au marché mais veut que nous la débarquions… que nous les débarquions en un lieu qu’elle ne nous a pas encore précisé.

— Mieux vaudrait se préparer pour la nuit, capitaine », gronda un marin. Un murmure d’assentiment monta de l’équipage. La nuit ne tomberait pas avant plusieurs heures et le temps ne semblait pas à la pluie. Ils préfèrent éviter de parler d’elle, déduisit Everard. Ils n’ont aucun reproche à lui faire, j’en suis sûr, mais elle leur apparaît comme surnaturelle. Vagnio s’empressa d’acquiescer.

Everard proposa de les aider à accomplir leurs tâches. Veillant à rester poli, car un hôte était sacré, le capitaine lui rétorqua qu’un marin d’eau douce ne ferait que les gêner. Everard s’éloigna donc, suivant la direction prise par Edh et Heidhin.

Il vit qu’ils s’étaient arrêtés un peu plus loin. Selon toute évidence, ils discutaient ferme. Elle eut un geste étrangement impérieux pour une femme aussi jeune. Heidhin tourna les talons et rebroussa chemin d’un pas vif. Edh poursuivit sa route.

« C’est peut-être une chance à saisir, dit Everard en mode subvocal. Je vais essayer d’engager la conversation avec lui.

— Soyez prudent, conseilla Floris. Il semble assez énervé…

— Ouais. Mais il faut bien tenter le coup, non ? »

C’était pour cela qu’ils étaient ici, ayant choisi d’entrer en contact avec le navire plutôt que de localiser son point de départ en remontant dans le temps. Ils n’osaient pas aborder de front la source de l’instabilité, cet événement inconnu et fragile d’où pouvait surgir tout un nouvel avenir. Ici, du moins l’espéraient-ils, ils avaient une chance d’en apprendre davantage en courant le minimum de risques.

Heidhin pila devant l’étranger, qu’il gratifia d’un regard furibond. Encore adolescent lui aussi, il n’avait qu’un ou deux ans de plus qu’Edh. Dans ce milieu, cela faisait de lui un adulte, mais il était encore dégingandé, pas tout à fait formé, et seul un fin duvet poussait sur ses joues. Il était vêtu d’une tunique et d’une culotte de laine, qui dégageaient une forte odeur dans l’atmosphère humide, et chaussé de bottes blanchies par le sel. Une épée pendait à sa ceinture.

« Salut ! » lança Everard. En surface, il était tout sourires. Mais une sueur glacée coulait sur son cuir chevelu.

« Salut », grommela Heidhin. Dans l’Amérique du XXe siècle, son attitude n’aurait rien eu de choquant chez un adolescent. Ici et maintenant, elle frisait l’insulte. « Que veux-tu ? » Il marqua une pause avant d’ajouter, toujours aussi peu amène : « Ne suis pas cette femme. Elle souhaite rester seule.

— N’est-ce pas dangereux ? demanda Everard – une question des plus naturelle.

— Elle n’ira pas très loin et sera de retour avant la tombée de la nuit. En outre…» Heidhin laissa sa phrase inachevée. Il semblait en proie à une lutte intérieure. Le désir de paraître important et mystérieux contre l’obligation de discrétion, devina Everard. Mais, lorsqu’il reprit la parole, ce fut avec une terrifiante sincérité. « Quiconque osera l’offenser subira un sort pire que la mort. Elle est l’élue d’une déesse. »

Le gémissement du vent gagna-t-il en intensité ? « Tu la connais bien, donc.

— Je… je voyage à ses côtés.

— Et quelle est votre destination ?

— Pourquoi veux-tu le savoir ? s’emporta Heidhin. Laisse-moi tranquille !

— Du calme, mon ami, du calme », dit Everard. Son âge et sa carrure lui donnaient un avantage. « Simple curiosité de la part d’un étranger. J’aimerais en savoir davantage sur… Edh, c’est ainsi que le capitaine l’a appelée, je crois. Toi tu es Heidhin, c’est cela ? »

La curiosité sembla l’emporter chez le jeune homme, qui se détendit quelque peu. « Et toi ? Nous nous sommes posé bien des questions en te voyant sur le rivage.

— Je suis un voyageur, Maring le Marcoman – un peuple dont tu n’as sans doute jamais entendu parler. Vous connaîtrez mon récit ce soir, à la veillée.

— Quelle est ta destination ?

— Je vais là où ma chance me conduit. »

Heidhin resta muet quelques instants. Les vagues murmuraient doucement. Un goéland piailla dans le ciel. « Et si tu nous étais envoyé ? » souffla-t-il.

Everard sentit son pouls s’accélérer. Il s’obligea à répondre d’une voix posée : « Qui pourrait m’envoyer à vous, et pour quelle raison ?

— Écoute, bafouilla Hiedhin, Edh va là où Niaerdh lui ordonne d’aller, au moyen de rêves et de signes. Elle pense que c’est ici que nous devons débarquer pour gagner l’intérieur des terres. J’ai essayé de lui expliquer que cette contrée était misérable, avec de rares villages et de nombreux brigands. Mais elle…» Il déglutit. La déesse était censée la protéger. La foi et le bon sens s’affrontèrent en lui, puis conclurent un armistice. « Si un second guerrier l’accompagnait…

— Oh ! c’est fantastique, intervint la voix de Floris.

— Je ne sais pas si je pourrais entrer dans la peau d’un jouet du destin, l’avertit Everard en mode subvocal.

— Vous pouvez au moins prolonger la conversation.

— Je vais essayer. »

S’adressant à Heidhin : « Voilà qui est nouveau pour moi, comprends-le. Mais nous pouvons en discuter. Je n’ai rien d’autre à faire pour le moment, et toi ? Marchons un peu sur cette plage, et tu m’en apprendras davantage sur Edh et sur toi. »

Le jeune homme baissa les yeux. Il se mordit les lèvres, rougit, blêmit, rougit à nouveau. « C’est plus difficile que tu ne le crois, souffla-t-il.

— Mais je dois en savoir plus avant de m’engager, non ? » Everard posa sa grosse main sur la frêle épaule voûtée. « Prends ton temps, mais raconte-moi tout.

— Edh… C’est elle qui… Elle devrait décider…

— Quel pouvoir possède-t-elle pour qu’un homme comme toi obéisse à sa moindre parole ? » Fais preuve du respect qui s’impose. « Une si jeune fille peut-elle être prêtresse ? Voilà qui serait inouï. »

Heidhin leva les yeux. Il tremblait de tous ses membres. « Oui, c’est une prêtresse, et bien plus encore. La déesse est venue à elle et, à présent, elle appartient à Niaerdh et va répandre sa colère de par le monde.

— Quoi ? Et contre qui la déesse est-elle en colère ?

— Contre le peuple de Romaburh !

— Mais quel mal a-t-il pu faire ? » En ces terres si éloignées de Rome.

« Ils… ils… Non, ceci est trop sacré pour que j’en parle. Attends d’avoir rencontré Edh. Elle t’en apprendra autant qu’elle le jugera nécessaire.

— C’est bien trop demander », répliqua Everard, protestation raisonnable dans la bouche du voyageur qu’il feignait d’être. « Tu me laisses dans l’ignorance de votre histoire et de votre destination, et tu voudrais que je veille sur une fille susceptible d’exciter la concupiscence des pillards et la convoitise des esclavagistes…»

Heidhin poussa un cri. Son épée jaillit du fourreau. « Tu oses ! » La lame s’abattit en vrombissant.

Everard ne dut son salut qu’à ses réflexes. Il abaissa sa pique juste à temps pour parer le coup. Le fer s’enfonça dans le frêne. Celui-ci ne rompit point. Heidhin dégagea son arme et la leva une nouvelle fois. Everard empoigna la sienne des deux mains, comme si c’était un bâton. Je ne dois pas le tuer, il sera vivant dans l’avenir, et puis ce n’est qu’un gamin… Un coup en plein front. Un coup qui aurait envoyé Heidhin dans les pommes, si la hampe ne s’était pas cette fois brisée en deux. Il vacilla sur ses jambes.

« Calme-toi, petite brute ! » rugit Everard. La rage et l’inquiétude se disputaient ses pensées. Qu’est-ce qui se passe, bon sang ? « Tu veux des hommes pour ta fille, oui ou non ? »

Poussant un nouveau hurlement, Heidhin lui sauta dessus. Il était si faible que le Patrouilleur n’eut aucun mal à esquiver son épée. Lâchant sa pique, il chercha le corps-à-corps, agrippa la tunique de laine, fit pivoter le jeune homme sur sa hanche et l’envoya s’effondrer à deux mètres de là.

Heidhin se releva tant bien que mal et saisit le couteau passé à sa ceinture. J’ai intérêt à en finir vite. Everard lui décocha une manchette dans le plexus solaire. Sans trop forcer. Heidhin se plia en deux, le souffle coupé. Everard se pencha sur lui pour s’assurer qu’il ne lui avait pas cassé une côte et qu’il ne risquait pas de s’étouffer dans ses vomissures.

« Wat drommel… Qu’est-ce que ça veut dire ? » s’écria Floris, consternée.

Everard se redressa. « Aucune idée, répondit-il d’une voix atone. J’ai dû toucher un point sensible par inadvertance. Sans doute était-il épuisé mentalement après des journées, voire des semaines, passées à ruminer sur ce navire. Rappelez-vous qu’il est tout jeune. J’ai dit ou fait quelque chose qui a déclenché chez lui une crise d’hystérie. Chez un jeune mâle appartenant à cette culture, ça se traduit toujours par la folie meurtrière.

— Je suppose que… vous ne… réparer les dégâts…

— Aucune chance. Notre mission est suffisamment délicate comme ça. » Everard scruta la grève. Edh n’était qu’une petite tache sombre, à moitié noyée dans la brume venue de la mer. Perdue dans ses rêves, ses cauchemars ou ses méditations, elle n’avait même pas remarqué l’altercation. « Je ferais mieux de m’en aller. Les marins me croiront lorsque je leur dirai que j’ai été secoué – ce qui n’est pas faux –, mais que je n’ai souhaité ni achever mon adversaire, ni courir le risque d’un affrontement, ni espérer une quelconque réconciliation. Je leur dirai que ce freluquet n’est rien pour moi et je m’en irai, point. »

Il récupéra la pointe de sa pique, ce que Maring n’aurait pas manqué de faire, et se dirigea vers le navire. Ces braves gars vont être déçus, se dit-il. Eux qui adorent entendre des récits portant sur des pays lointains. Enfin, ça m’évite de réviser tous les boniments qu’on avait concoctés à leur intention.

« Dans ce cas, autant nous rendre directement sur Öland, dit Floris d’une voix aussi atone que la sienne.

— Pardon ?

— C’est la patrie d’Edh. Le capitaine l’a identifiée sans risque d’erreur. Une île longue et étroite de la mer Baltique, au large de la Suède. C’est en face d’elle que sera bâtie la cité de Kalmar. J’y suis allée en vacances. » Sa voix se fit songeuse. « Un endroit charmant, du moins dans l’avenir. Des vieux moulins un peu partout, des tumulus antiques, des villages nichés au creux des collines, et sur chacune des deux pointes un phare dominant une mer peuplée de voiliers… Mais c’était l’avenir.

— Voilà un lieu de villégiature fort tentant, commenta Everard. A l’avenir, comme vous dites. » Peut-être. Tout dépend des souvenirs que je rapporterai de ce lieu tel qu’il est dix-neuf siècles avant mon époque. Il pressa le pas.

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