Prise de tête
Les magiciens préfèrent employer, pour désigner l’« univers », le terme de « multivers ». Parce que le multivers est l’ensemble de tous les univers possibles, parmi lesquels figure celui où nous vivons.
De la même façon que les pages d’un livre, indépendantes, forment un tout (le livre), de nombreux univers coexistent à des niveaux différents et constituent une entité (le multivers).
Ces univers se côtoient dans un « espace des possibles ». Chacun possède ses lois propres. Les physiciens quantiques qui croient à l’existence réelle de ces mondes (je ne plaisante pas !) parlent de « mousse d’univers ».
Comme quoi la science, si elle garde des distances prudentes avec la magie, rejoint souvent la poésie.
Certaines antiques traditions font la part belle au multivers dans leur cosmogonie. Les Nordiques notamment distinguaient neuf mondes, reliés entre eux par un axe vivant, un arbre gigantesque. Il y avait le monde des nouveaux dieux, celui des anciens dieux, la terre des elfes, celle des hommes, celle des géants et celle des nains, le domaine des glaces, celui du feu et celui de la mort.
J’en ai parlé avec mademoiselle Rose, lorsque je suis devenu Agent (stagiaire). J’ai rapidement compris que, pour elle, le concept de multivers était une évidence. Et que des mondes pas franchement joyeux gravitaient à proximité du nôtre. Rose, elle, avait l’air de penser qu’il valait mieux s’en tenir loin.
Personnellement, je trouvais l’idée plutôt chouette. Tout devenait tellement vaste !
Ensuite, j’ai progressé dans la connaissance des arcanes.
J’ai aussi été confronté à un démon surgi d’une autre dimension, venu d’un de ces mondes appartenant au multivers.
Du coup je comprends, à présent, les appréhensions de mademoiselle Rose, et j’adhère complètement à ce vieux et sage dicton : « Pour vivre heureux, vivons caché. »