Le sergent Daw commença par faire quelques difficultés, mais il finit par accepter de donner ses avis à titre privé sur une affaire qu'on lui soumettrait. Il ajouta qu'il fallait bien se rappeler une chose: il ne pouvait que donner des conseils; en effet, si une action devenait nécessaire, il devrait en référer au Quartier Général. Cela étant bien entendu, je le laissai dans le bureau et lui amenai Miss Trelawny et Mr. Corbeck. Avant que nous quittions la chambre, Nurse Kennedy avait repris sa place au chevet du malade.
– Pensez-vous qu'en dehors de vous, quelqu'un pourrait identifier vos lampes? demanda Daw.
– Personne d'autre que moi!
– Les autres sont-elles semblables?
– Pas que je sache, répondit Mr. Corbeck, bien qu'il puisse y avoir d'autres qui leur ressemblent à bien des égards.
Le détective marqua un temps avant de demander encore:
– Est-ce qu'une autre personne experte en la matière – appartenant, par exemple, au British Museum, ou un marchand, ou un collectionneur tel que Mr. Trelawny – connaîtrait la valeur, la valeur artistique j'entends, de ces lampes?
– Certainement! Quiconque a la tête sur les épaules verrait au premier coup d'œil que ces objets ont de la valeur.
Le visage du détective s'éclaira.
– Alors, il y a une chance. Si votre porte était verrouillée et votre fenêtre fermée, ces objets n'ont pas été volés par une femme de chambre ou un garçon d'étage venant à passer par là. Celui qui a fait le coup, quel qu'il soit, est venu spécialement; et il ne va pas se séparer de son butin sans en tirer le prix qu'il vaut. C'est un cas où il faudrait aviser les prêteurs sur gages. Il y a quelque chose de bon, en tout cas, c'est qu'il n'est pas nécessaire de le crier sur les toits. Nous n'avons pas besoin d'aviser Scotland Yard sauf si vous le souhaitez; nous pouvons mener l'affaire en privé. Si vous désirez que la chose ne se sache pas, comme vous me l'avez dit tout d'abord, c'est notre chance.
Après un temps, Mr. Corbeck dit avec calme:
– Je suppose que vous ne pourriez pas risquer une suggestion sur la façon dont le vol a été fait?
Le policier eut un sourire exprimant le savoir et l'expérience.
– D'une manière très simple, je n'en doute pas, monsieur. C'est ainsi que tournent à la longue tous ces crimes mystérieux. Le criminel connaît son métier et toutes ses finesses; et il est toujours à l'affût des occasions. De plus, il sait par expérience ce que ces occasions risquent d'être, et comment elles se présentent habituellement. L'autre personne se contente de faire attention; elle ne connaît pas tous les trucs, toutes les embûches qui peuvent lui être tendues et par inadvertance ou autrement il tombe dans le piège. Quand nous saurons tout sur cette affaire, vous serez surpris de ne pas avoir vu dès le début la méthode employée!
Cette déclaration parut ennuyer quelque peu Mr. Corbeck; quand il répondit, il y avait dans son ton une nette chaleur:
– Écoutez-moi, mon bon ami, il n'y a rien de simple dans cette affaire – sauf le fait que ces objets ont été dérobés. La fenêtre était fermée; le foyer était fermé par des briques. Il n'y a qu'une porte à cette chambre, elle était fermée à clef et verrouillée. Il n'y a pas d'imposte; j'ai entendu souvent parler de vols dans les hôtels à travers une imposte. Je n'ai jamais quitté ma chambre pendant la nuit. Avant de me coucher, j'ai vérifié la présence des objets; et j'ai été de nouveau les voir à mon réveil. Si à partir de ces données vous pouvez monter une affaire de vol pur et simple, vous êtes un homme intelligent. C'est tout ce que je dis; assez intelligent pour vous élancer et me rapporter mes objets!
Miss Trelawny, dans une attitude d'apaisement, lui posa la main sur le bras et dit avec calme:
– Ne vous affolez pas sans nécessité. Je suis sûre que ces objets reviendront.
Le sergent Daw se tourna vers elle si rapidement que je ne pus m'empêcher de me rappeler les soupçons qu'il avait déjà conçus à son sujet, tandis qu'il disait:
– Puis-je vous demander, mademoiselle, sur quoi vous fondez cette opinion?
J'avais peur d'entendre sa réponse, proférée devant des oreilles déjà éveillées à la méfiance; mais elle me causa tout de même une nouvelle douleur ou un nouveau choc:
– Je ne peux pas vous le dire pour le moment. Mais j'en suis sûre.
Le détective l'examina pendant quelques secondes sans rien dire, puis me lança un regard rapide.
Ensuite il eut encore un entretien avec Mr. Corbeck pour connaître ses déplacements, des détails concernant l'hôtel et sa chambre, le moyen d'identifier les objets volés. Il partit alors pour commencer son enquête. Mr. Corbeck avait insisté sur la nécessité de garder le secret, de peur que le voleur, sentant venir le danger, ne détruise les lampes. Mr. Corbeck promit en partant de s'occuper de différentes questions et de ses affaires personnelles, de revenir tôt dans la soirée, et de rester dans la maison.
Pendant toute cette journée, Miss Trelawny fut de meilleure humeur et parut plus forte qu'elle n'avait jamais été, en dépit du nouveau choc et des ennuis représentés par le vol, appelé à causer par la suite un tel dépit à son père.
Nous avons consacré la plus grande partie de la journée à passer en revue les trésors de Mr. Trelawny. D'après ce que j'entendis dire par Mr. Corbeck, je commençai à me faire quelque idée de l'étendue de son entreprise dans le domaine de la recherche égyptologue. Et, grâce à ces éclaircissements, tout ce qui m'entourait commençait à présenter un intérêt nouveau. Plus j'allais, plus mon intérêt s'accroissait; tous les doutes qui pouvaient subsister en moi s'étaient changés en émerveillement et en admiration. La maison semblait être un véritable magasin de merveilles d'art antique. En dehors des curiosités, grandes et petites, qui se trouvaient dans la chambre de Mr. Trelawny – depuis les grands sarcophages jusqu'aux scarabées de toutes sortes qui se trouvaient dans les cabinets – le grand vestibule, les paliers de l'escalier, le bureau et même le boudoir, étaient pleins d'antiquités qui auraient fait venir l'eau à la bouche d'un collectionneur.
Miss Trelawny m'accompagna dès le début et regarda tout avec un intérêt croissant. Après avoir examiné quelques cabinets pleins d'amulettes exquises, elle me dit avec une parfaite naïveté:
– Vous le croirez difficilement, mais jusqu'à ces derniers temps je n'avais pour ainsi dire jamais regardé ces objets. Ce n'est que depuis que mon père est malade qu'il m'a semblé éprouver une certaine curiosité pour eux. Mais à présent, cet intérêt ne cesse de croître. Je me demande si ce n'est pas le sang de collectionneur circulant dans mes veines qui commence ainsi à se manifester. S'il en est ainsi, la chose curieuse c'est que je n'avais jamais jusqu'à présent ressenti cette attirance. Bien entendu je connais la plupart des grosses pièces, et je les ai plus ou moins examinées; mais, réellement, d'une certaine façon, je les avais toujours considérées comme des choses établies, comme si elles s'étaient toujours trouvées là. J'ai fait souvent la même remarque avec les tableaux de famille, dont on trouve la présence toute naturelle. Si vous me permettez de les examiner avec vous, ce sera délicieux!
C'était une joie de l'entendre parler ainsi; et sa dernière suggestion m'enthousiasma. Nous avons fait ensemble le tour des différentes pièces et des couloirs, en examinant, en admirant les magnifiques curiosités. Il y avait une telle accumulation déroutante, une telle vérité d'objets que nous ne pouvions accorder à la plupart qu'un rapide coup d'œil; mais à mesure que nous avancions dans notre visite, nous nous décidâmes de les examiner un par un, de plus près, jour après jour. Dans le vestibule se trouvait une sorte de grande charpente d'acier ornementé qui, d'après Margaret, était employée par son père pour soulever les lourds couvercles de pierre des sarcophages. Cet appareil n'était pas lourd et pouvait être déplacé assez facilement. Grâce à lui, son père pouvait soulever les couvercles à sa guise et examiner les longues suites d'hiéroglyphes qui se trouvaient gravés sur certains. Bien que se déclarant ignorante, Margaret connaissait beaucoup de choses à leur sujet; pendant l'année qu'elle venait de passer avec son père, elle avait bénéficié d'une leçon quotidienne. Elle était remarquablement intelligente et avait l'esprit très ouvert, ainsi qu'une prodigieuse mémoire si bien que ses connaissances, accumulées par fragments, avaient pris des proportions qu'auraient enviées bien des savants.
Les sarcophages les plus intéressants étaient sans aucun doute les trois qui se trouvaient dans la chambre de Mr. Trelawny. Deux d'entre eux étaient faits d'une pierre de couleur sombre, l'un de porphyre, l'autre d'une sorte de minerai de fer ou d'hématite. Ils étaient gravés d'hiéroglyphes. Mais le troisième en différait d'une manière frappante. Il était fait dans une substance d'un jaune brun faisant penser à de l'onyx du Mexique; elle lui ressemblait à bien des égards, sauf que ses dessins étaient moins accentués. Çà et là se présentaient des surfaces presque transparentes – d'autres translucides à coup sûr. Le coffre tout entier, couvercle compris, était gravé de centaines peut-être de milliers d'hiéroglyphes minuscules, qui semblaient constituer des séries sans fin. Le dos, le devant, les côtés, les bords, le fond, avaient tous leur part de ces images délicates, tracées en bleu foncé, couleur qui tranchait sur la pierre jaune. Il était très long, près de trois mètres, sur peut-être un mètre de large. Les côtés étaient ondulés, si bien qu'il n'y avait pas de ligne brutale. Les coins eux-mêmes affectaient des courbes agréables à l'œil.
Ce sarcophage était placé près d'une fenêtre. Il était à un certain point de vue différent de tous les autres existant dans la maison. Tous ceux-là, quelle que fût la matière dont ils étaient faits – granit, porphyre, hématite, basalte, ardoise, ou bois – avaient à l'intérieur une forme très simple. Certains avaient une surface intérieure complètement lisse; d'autres étaient gravés, dans leur totalité ou partiellement, d'hiéroglyphes. Mais tous, autant qu'ils étaient, ne comportaient aucune protubérance ni aucune surface irrégulière. On aurait pu les utiliser comme baignoires; à dire vrai, ils ressemblaient à bien des égards aux bains romains de pierre ou de marbre que j'avais vus. Cependant, à l'intérieur de celui-ci, il y avait une surface en relief, affectant le contour d'un corps humain. Je demandai à Margaret si elle pouvait donner une explication quelconque de ce fait.
– Mon père, me répondit-elle, ne voulait jamais en parler. Cette particularité avait dès le début attiré mon attention; mais quand je lui demandai une explication, il me répondit: «Je te dirai tout un jour, petite fille – si je vis! Mais pas encore. L'histoire n'a pas été encore racontée, telle que j'espère te la raconter! Un jour, peut-être proche, je saurai tout; et nous verrons tout cela ensemble. Et tu trouveras là une histoire puissamment intéressante – du début à la fin!» Par la suite, je lui dis une fois – un peu à la légère, je le crains: «Est-ce que cette histoire du sarcophage est déjà racontée, père?» Il secoua la tête, me regarda d'un air grave et dit: «Pas encore, petite fille; mais elle le sera – si je vis – si je vis!» Cette façon de répéter qu'il fallait qu'il vive m'effrayait plutôt je ne me suis jamais risquée à le lui redemander.
Cela me faisait plus ou moins frissonner. Mais je ne pouvais dire exactement comment ni pourquoi; mais finalement cela projetait une certaine lumière. Il y a, je crois, des moments où l'esprit accepte quelque chose comme vrai; cependant il ne peut expliquer le cheminement de cette pensée, ni, s'il y a plus d'une pensée, quelle connexion existe entre elles. Jusque-là nous nous étions trouvés plongés dans une telle obscurité pour tout ce qui concernait Mr. Trelawny, et l'étrange visite qui lui était arrivée, que toute chose susceptible de fournir un indice, même le plus faible et le plus nébuleux, donnait immédiatement la satisfaction d'apporter un éclaircissement et une certitude. Il y avait ici deux points lumineux dans notre casse-tête. Le premier, c'était que Mr. Trelawny avait associé à cet objet déterminé un doute sur sa propre survie. Le second, c'était qu'il avait un certain but à atteindre en ce qui le concernait, ou qu'il en attendait quelque chose, qu'il ne dévoilerait, même à sa fille, qu'après sa réalisation. De nouveau, il fallait avoir présent à l'esprit le fait que ce sarcophage différait intérieurement de tous les autres. Que signifiait cette étrange partie en relief? Je ne dis rien à Miss Trelawny car je craignais de l'effrayer ou de faire naître en elle des espoirs futurs; mais je décidai de profiter de la première occasion pour procéder à une investigation plus poussée.
Tout à côté du sarcophage, se trouvait une table basse de pierre verte à veines rouges, comme du jaspe sanguin. Les pieds avaient été façonnés pour imiter les pattes d'un chacal, et autour de chaque pied s'enroulait un serpent délicatement ciselé dans de l'or massif. Sur cette table reposait un coffre étrange et très beau, ou un cercueil de pierre d'une forme particulière. Cela ressemblait en effet à un petit cercueil, avec la différence que les côtés les plus longs, au lieu d'être coupés perpendiculairement comme les parties supérieure et inférieure se terminaient en pointe.
C'était ainsi un heptaèdre irrégulier, puisqu'il comportait deux plans sur chacun des deux côtés, un bout, un dessus et un fond. La pierre, d'un seul morceau, dans laquelle il avait été creusé, ne ressemblait à rien de ce que j'avais vu. À la base, elle était d'un beau vert, de la couleur de l'émeraude sans avoir, bien entendu, son éclat. Elle n'était cependant en aucune façon terne, ni comme couleur, ni comme substance, mais d'une contexture très fine et d'une grande dureté. En allant vers le haut la couleur devenait plus claire, suivant une gradation imperceptible, pour arriver à un beau jaune qui était presque de la couleur de la porcelaine «mandarine». Cela ne ressemblait à rien que je connusse, c'était différent de toutes les pierres et gemmes que j'avais vues. Toute la surface à part quelques endroits, était gravée de fins hiéroglyphes, admirablement exécutés et colorés par le même ciment ou pigment qu'on observait sur le sarcophage. Le sarcophage avait à peu près deux pieds et demi de longueur; la moitié de largeur et près d'un pied de haut. Les espaces non gravés étaient distribués irrégulièrement sur la partie supérieure et jusqu'à l'extrémité pointue. Trois endroits paraissaient moins opaques que le reste de la pierre. J'essayai de soulever le couvercle, – pour voir si ces endroits étaient translucides; mais il était solidement fixé. Il s'adaptait si exactement que l'ensemble du coffre avait l'air d'être un seul bloc de pierre qui aurait été, on ne savait comment, évidé de l'intérieur. Sur les côtés et les bords se remarquaient des protubérances à l'aspect étrange qui avaient été sculptées en taillant directement la pierre. Ils avaient des trous ou des creux aux formes bizarres, tous différents les uns des autres; et, comme le reste, ils étaient couverts d'hiéroglyphes, gravés délicatement et remplis du même ciment bleu vert.
De l'autre côté du grand sarcophage se trouvait une autre petite table d'albâtre, délicatement ciselée de figures symboliques de dieux et de signes du zodiaque. Sur cette table était posée une boîte d'environ un pied carré faite de plaques de cristal de roche assemblées sur un châssis rouge doré, magnifiquement gravé d'hiéroglyphes, et coloré en bleu vert, très semblable à celui du sarcophage et du coffre. L'ensemble du travail était tout à fait moderne.
Mais si cette boîte était moderne, son contenu ne l'était pas. À l'intérieur, sur un coussin de tissu d'or aussi fin que de la soie, et ayant la douceur particulière au vieil or, reposait une main momifiée, d'une perfection saisissante. Une main de femme, fine et longue, avec des doigts fuselés presque aussi parfaite que lorsqu'elle avait été livrée à l'embaumeur des milliers d'années auparavant. L'embaumement ne lui avait rien fait perdre de sa beauté; le poignet lui-même, doucement ployé sur le coussin, ne semblait avoir rien perdu de sa souplesse. La peau était d'une belle couleur laiteuse ou vieil ivoire – une belle peau légèrement hâlée qui faisait penser à la chaleur, mais la chaleur dans l'ombre. La grande particularité de cette main était qu'elle comportait sept doigts, deux médius et deux index. L'extrémité supérieure du poignet était déchiquetée, comme si elle avait été cassée, et tachée de rouge brun. Sur le coussin, à côté de la main se trouvait un petit scarabée, délicatement ciselé dans une émeraude.
Margaret remarqua mon admiration, et dit:
– C'est encore un des mystères de mon père. Quand je lui posais des questions à ce sujet, il disait que c'était peut-être, parmi les objets qu'il possédait, celui qui avait le plus de valeur – à l'exception d'un, toutefois. Quand je lui demandais quel était ce dernier objet, il refusait de me le dire et m'interdisait de lui poser aucune question à ce sujet: «Je te dirai tout, là aussi, le moment venu, si je vis!» «Si je vis!» toujours la même phrase. Ces trois objets réunis, le sarcophage, le coffre, et la main, semblaient constituer un triple mystère.
Par la suite, je demandai à Miss Trelawny comment il se faisait que l'ameublement du boudoir, la pièce dans laquelle nous nous trouvions, était si différent de celui des autres pièces.
– C'est dû à la prévoyance de mon père, répondit-elle. Quand je suis venue ici, il se dit, assez pertinemment, que je pourrais être effrayée par tant d'allusions à la mort et aux tombeaux comme on en voyait partout. Il a donc fait meubler de jolies choses cette pièce et le petit appartement à la suite – cette porte donne sur le salon – où j'ai couché la nuit dernière. Vous voyez, tous ces meubles sont très beaux. Le cabinet a appartenu au grand Napoléon.
– Il n'y a donc rien d'égyptien dans ces pièces, lui demandai-je plutôt pour manifester de l'intérêt à l'égard de ce qu'elle disait que pour toute autre raison, car la façon dont l'appartement était meublé parlait d'elle-même? Quel ravissant cabinet! Puis-je le regarder?
– Naturellement! Avec le plus grand plaisir, répondit-elle en souriant. D'après ce que dit mon père, sa finition, extérieure et intérieure, est absolument parfaite.
Je m'avançai pour le regarder de près; il était en bois de rose, orné de marqueteries, monté sur or moulu. Je tirai l'un des tiroirs, l'un des plus profonds pour que je puisse en voir le travail dans les meilleures conditions. J'entendis quelque chose qui roulait à l'intérieur; c'était comme le tintement du métal contre le métal.
– Dites donc! dis-je. Il y a quelque chose là-dedans. J'aurais peut-être mieux fait de ne pas l'ouvrir.
– Il n'y a rien, que je sache, répondit-elle. Une femme de chambre y a peut-être mis quelque chose provisoirement et a cessé d'y penser. Ouvrez, de toute façon!
J'ouvris grand le tiroir. En même temps, Miss Trelawny et moi-même, nous sursautâmes de stupéfaction.
Là, sous nos yeux, il y avait un certain nombre de lampes égyptiennes, de différentes tailles, de formes étranges et variées.
Nous nous penchâmes pour les examiner de près. Mon cœur battait comme un marteau à bascule; d'après la façon dont sa poitrine se soulevait, je pouvais voir que Margaret était étrangement excitée.
Pendant que nous regardions, ayant peur de toucher et presque de penser, on sonna à la grande porte. Immédiatement après Mr. Corbeck, suivi du sergent Daw, entrait dans le vestibule. La porte du boudoir était ouverte, et, quand ils nous virent, Mr. Corbeck, suivi à une certaine distance par le détective, entra dans la pièce.
Il s'arrêta, frappé par l'étrange pâleur de Margaret. Alors, ses yeux, suivant le regard de celle-ci et le mien, se posa sur les lampes qui se trouvaient dans le tiroir. Il poussa un cri de surprise et de joie, se pencha, et toucha les lampes.
– Mes lampes! Mes lampes! Elles sont sauvées… sauvées… sauvées! Mais comment, que Dieu m'en soit témoin – que tous les dieux m'en soient témoins – sont-elles venues jusqu'ici?
Nous restions tous silencieux. Le détective reprit bruyamment sa respiration. Je tournai les yeux vers lui, il surprit mon regard et lança un coup d'œil à Miss Trelawny qui lui tournait le dos.
Il avait la même expression de soupçon que lorsqu'il m'avait fait remarquer qu'elle avait été la première à se trouver près de son père à l'occasion de chacune des attaques.